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HISTOIRE MODERNE.

annales musulmanes ; car, dès le neuvième siècle de notre ère, sous le khalyfat de Motaouakkel, on avait vu en Orient Mahhmoud-ben-Farag jouer le rôle du radieux Mousay-ben-A’mrân ; mais il n’est pas douteux, dans l’espèce, que la qualification de nouveau Moïse n’ait été une expression purement métaphorique, trop légèrement admise par des narrateurs irréfléchis. D’autres ont été plus loin, et n’ont pas craint de mettre sur le compte du félan Mohhammed les événemens qui ont passé sur la tête du nègre Demba !… De telles méprises sont à peine concevables.

On voyait s’accroître chaque jour le nombre des partisans qu’amassait autour de Demba le charlatanisme prophétique dont le rusé Nghiâgha-I’ysay lui dictait les formules, et pour lequel lui-même était ostensiblement le premier à professer un superstitieux enthousiasme. L’or arrivait en abondance au prétendu saint, qui ne trouvait que ce seul présent digne de lui être offert ; et tous ses prosélytes étaient prêts à le suivre partout où il voudrait les conduire, disposés à obéir à ses moindres signes.

Les circonstances étaient favorables pour tirer parti de la ferveur qu’il avait allumée : les guerres intestines qui depuis peu déchiraient le Ouâlo offraient aux projets ambitieux de Nghiâgha-I’ysay une occasion opportune d’éclater.

Ce pays, divisé par les factions, semblait en effet aisé à subjuguer ; des inimités personnelles y avaient allumé des discordes générales. Dans cet état,