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FRAGMENS LITTÉRAIRES.

solable de cette perte, qu’on attribua dans le moment à plusieurs causes sans connaître la véritable ; car depuis on sut que le malin esprit l’avait conduit dans un lieu où jamais être vivant n’avait été.

» Elle fit vœu à Notre-Dame de ne plus quitter la forêt de Lions, et resta dans le château de Mortemer, pendant que son mari et son fils Rodolphe adoptèrent l’Angleterre pour patrie.

» La dame de Mortemer consacra sa vie aux bonnes actions et à faire des aumônes. Elle faisait tant de bien à tout ce qui l’entourait qu’elle était nommée la bonne dame, et qu’on la regardait comme une sainte. Il était même passé en proverbe, parmi tous les serfs du fief de Mortemer, de dire le château de Notre-Mère, au lieu de Mortemer[1]. Une tradition de ce temps conserve également l’époque de sa mort, arrivée en 1034. Après cette fin, elle fut changée en bon esprit ; chaque samedi elle apparaissait à minuit sur la plus haute tourelle du château de Mortemer[2], du côté de Lisors, où elle avait bâti une chapelle à la Vierge.

« Là, s’il y avait eu quelque sort jeté sur les bes-

  1. Ce fief était très étendu : indépendamment de Varclive, il comprenait Lisors, Ble-Quentin, Lalande, Belfuissal, Mont-Roti, la Neuf-Grange, La Vallée, Port mort, Andelys, etc.

    Dès 1205, Amauri de Varclive avait donné l’église de Varclive à l’abbaye de Mortemer. (Description et Histoire de la Normandie, tom. ii. Paris, 1740.)

  2. On voit encore aujourd’hui un énorme vestige de mur d’enceinte ou de base de grande tour antérieur à la construction du monastère. Il est à gauche en allant à Mortemer, et un peu avant la ferme qui précède l’abbaye. Sur le mur même, qui est en partie