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ALBUM.

tenant un monarque nouveau, et son bruit n’est plus qu’un signal d’union et de joie.

Un mois ! oui, le mois dernier. Le temps comme aujourd’hui était resplendissant de lumière… c’eût été un beau jour de fête ; mais les balles, mais la mitraille… ; aussi tout est dit maintenant, et le dernier boulet qui vint frapper les barricades, du même coup renversa une dynastie et fit jaillir un trône… Entendez-vous ces acclamations ?

Et ces étrangers, que veulent-ils, en agitant leurs chapeaux parés de nos couleurs. Écoutez… « Allons, s’écrient-ils, que les timides prennent courage ; c’est l’époque où il fait bon de mettre son étendard au vent : la liberté marche : elle a touché le Nord, et se dirige vers ces beaux lieux où le soleil est chaud, le ciel pur, et les nuits favorables aux travaux des braves. Elle va dresser ses tentes au milieu des empires, et les rois sages la salueront…. »

Quelle sympathie ! quel besoin universel ! comme elles arrivent au cœur ces palpitantes émotions ! comme elles me rappellent ma jeunesse ! Né à l’époque où tout commençait à se mouvoir, je me suis cru bercé dans le casque d’un soldat. J’aimais aussi alors, comme aujourd’hui, à voir les armes reluire au soleil, à entendre les chevaux hennir et frapper du pied, à voir flotter la bannière sous laquelle plus tard je reçus mes premières blessures, ma première épaulette et ma première croix… Mon imagination s’est toujours émue au bruit du tambour des camps, du clairon des batailles, et des clameurs enivrantes des soldats.

Jours poétiques de ma jeunesse, pourquoi, semblables à ces beaux momens du soir, qui rendent mal les heures du frais matin, venez-vous, trompeurs, apparaître à mes heures de retraite ?