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BULLETIN DRAMATIQUE.

qu’il adore : il veut la fuir. Sa vieille bonne, avant qu’il ne monte en voiture, lui fait de la morale dont voici à peu près le sens : « Avant d’être abandonné, vous avez abandonné Victorine, puis Laurette : elles seront mortes sans doute. Le ciel vous punit. — Oui, le ciel est juste, reprend le jeune homme, je mourrai probablement comme elles. » Il part. Sa voiture se brise en route : il est obligé de s’arrêter dans une auberge ; il retrouve là Victorine, bien fraîche et heureuse ; il commence par croire qu’on ne meurt pas d’amour. Il poursuit son chemin ; mais la voiture, qui n’avait pas été solidement raccommodée, éprouve dans un village un second accident. Il y a une noce : il retrouve Laurette qui se marie et feint de ne pas le reconnaître. Enfin il se remet en route pour la troisième fois ; mais son cocher qui, à ce qu’il paraît, avait décidément envie de le tuer, va accrocher la voiture d’une danseuse qui venait débuter à l’Opéra. Le jeune homme, échappé à ce troisième danger, s’embrase subitement à la vue de sa jolie voisine. Bref, il revient à Paris avec elle pour recommencer peut-être un nouveau voyage de désespoir dans un mois. Il y a des scènes plaisantes, d’autres invraisemblables. La pièce, qui ne roule que sur des voitures, a failli tomber comme elles, mais on en a ri. Léger succès.

La Petite Prude a obtenu un succès complet et mérité. On pourrait reprocher aux auteurs d’avoir choisi un sujet vieux et usé ; mais ils ont jeté sur cette pièce comique tant de traits d’esprit qu’ils ont désarmé la critique.

E.

THÉÂTRE DE LA GAîITÉ.Jeffries ou le Grand-Juge, quoique assez purement écrit, a fait bâiller tous ses auditeurs, et, pour les achever, les acteurs ont joué très faiblement. Mais cela se conçoit : il ne pouvait pas y avoir de vérité à rencontrer pour eux dans un drame qui fourmille d’invraisemblances et qui n’en finit pas.

P.