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LA GRÈCE EN 1829.

solation la plus complète. Voilà cependant des faits qu’il eût été bon de mettre en regard des dévastations qu’on a tant reprochées aux Égyptiens.

Primats.

Si les pallikares ont causé un mal infini à la Grèce, il est une autre classe qui n’en a pas moins fait, et elle est encore moins excusable, puisqu’elle était plus éclairée : c’est celle des Primats, que nous appellerions la bourgeoisie. Sous la domination des Turcs, cette classe sert d’intermédiaire entre eux et la masse du peuple, et elle réunit dans toute leur perfection tous les vices de l’esclavage. Son contact avec les Turcs ne lui a donné que de la bassesse ; habituée à ramper devant des maîtres, elle ne connaît d’autres armes que la ruse et la perfidie ; tout sentiment noble lui est inconnu : la soif de l’or les a tous remplacés. Les seuls rapports qu’elle ait avec le pays sont ceux d’une sangsue publique. Autant elle est humble et servile vis-à-vis des Turcs, autant elle est impitoyable vis-à-vis du peuple, qu’elle est chargée de pressurer. Plus elle paie cher le privilége de recueillir les impôts, de présider les communautés du pays, plus elle s’en dédommage sur le peuple, et toutes les avanies qu’elle éprouve sont payées par la masse qui n’a pas droit de se plaindre. Peut-on s’attendre à ce qu’une classe aussi abjecte conçoive la liberté, et qu’elle ait vu dans la révolution autre chose qu’une belle occasion pour assouvir à son aise la cupidité qui a toujours été son idole ?