Page:Revue des Deux Mondes - 1830 - tome 2.djvu/318

Cette page a été validée par deux contributeurs.
300
HISTOIRE.

population allaient croissant. C’est ainsi que le pays n’a bientôt présenté, dans toutes ses parties, qu’un monceau de ruines. La guerre contre l’ennemi a causé bien moins de mal. Les ravages des Égyptiens ont été bornés à un petit coin de la Messénie, tandis que, dans quelque partie de la Grèce qu’on pénètre, on la trouve entièrement ruinée. Demandez quels sont les auteurs de cette dévastation ; partout on vous répondra que c’est telle ou telle bande, tel ou tel capitaine. Cette réponse m’a été faite à chaque nouvelle ruine auprès de laquelle je m’arrêtais. J’ai vu, entr’autres, Mégare, qui était naguère une des villes les plus florissantes de la Grèce. Ses habitans industrieux jouissaient, sous les Turcs, de plusieurs immunités. Ils étaient les seuls gardiens du grand Dervend, le passage qui conduit en Morée ; à ce titre, ils ne payaient point d’impôts ; aucun Turc n’habitait au milieu d’eux, et ils se régissaient seuls. Leur pays était riche et parfaitement cultivé ; la ville comptait plus de 12,000 ames. Dans la guerre actuelle, les Musulmans n’ont jamais pénétré aux environs de Mégare, et il y a deux ans encore ce petit canton jouissait de toute sa prospérité. L’armée rouméliote y arriva alors, fuyant devant les Turcs, qui s’étaient enfin décidés à faire une attaque sérieuse. Elle était à peine entrée, que déjà la ville n’existait plus. Elle avait tout mis à feu et à sang ; les habitans s’étaient sauvés. Quand j’ai visité moi-même Mégare, je n’y ai trouvé que des décombres, les maisons brûlées, les oliviers coupés, les terres sans culture : tout portait les traces de la dé-