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STABS À SCHŒNBRUNN.

coulé pour la gloire de mon pays. Encore convalescent, j’étais placé sur l’une des marches du perron, appuyé sur la balustrade, je laissais aller mes pensées aventureuses. Je regardais avec orgueil ces milliers de soldats, foulant comme moi le sol de l’étranger. Elle n’était point à nous cette terre, et nous paraissions être plus que ses maîtres ;… nous passions seulement, mais nous passions en vainqueurs !… Ah ! premières impressions de la gloire, vous êtes donc bien puissantes, puisqu’après vingt années vous remuez encore avec tant de force l’ame d’un vieux soldat.

J’étais heureux d’appuyer ma faiblesse sur la force de ces braves que l’univers admirait. Je me plaisais aussi à comparer leur témérité dans les combats à leur douceur inoffensive chez les vaincus ; et dans le cercle des idées qui m’occupaient, je pensais que, pour récompenser leurs immenses travaux, le Ciel leur réservait peut-être une amie née dans ces climats.

Le soleil se reflétait sur leurs armes brillantes ; le ciel était serein. C’est une belle chose qu’un beau jour pour une ame préoccupée ! Tout paraissait sourire à ma naïve imagination, à mes désirs. Un seul faubourg de Vienne, un seul hôtel absorbait ma pensée ;… et tandis que Stabs creusait un tombeau… moi, simple, je rêvais amour.

Stabs, entraîné et disparaissant comme par enchantement ; les troupes défilant au pas accéléré ; l’artillerie légère exécutant un mouvement rapide, qui éleva bientôt un nuage de poussière au travers