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ARCHIVES GÉOGRAPHIQUES.

gards vers le ciel et nous mîmes à supplier le Tout-Puissant d’avoir compassion de nos âmes pécheresses. Nous ne comptions pas sur la moindre chance d’échapper à nos ennemis et nous nous attendions à être dévorés comme nos camarades venaient de l’être. La seule chose qui nous empêchait encore de nous rendre était la crainte d’être pris vivans et mis à la torture.

On voit en effet quelquefois, mais peu souvent, ces peuples torturer leurs prisonniers. Voici comment ils s’y prennent : ils enlèvent à leurs victimes la peau de la plante des pieds ; puis ils leur présentent des torches de tous côtés, ce qui les oblige à sauter pour fuir le feu et leur cause des douleurs atroces. Une autre manière consiste à couper les paupières à leurs prisonniers et à les exposer ainsi la face tournée vers le soleil. On dit que c’est un épouvantable supplice. Ils leur arrachent aussi parfois les ongles. Au reste, il paraît que ces tortures sont très rares, et qu’ils ne les infligent qu’à ceux qui les ont irrités au dernier point. Nous étions dans ce cas, ayant tué un si grand nombre des leurs, pour notre défense.

Il ne nous restait plus que seize ou dix-sept cartouches. Nous décidâmes alors qu’aussitôt qu’il ferait sombre nous appuierions la crosse de nos fusils à terre et le bout du canon contre notre poitrine, et que, dans cette position, nous lâcherions la détente, pour nous tuer nous-mêmes plutôt que de tomber vivans entre les mains de ces monstres.

À peine avions-nous pris cette résolution déses-