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UNE RENCONTRE DE BANDITS AU MEXIQUE.

ment que faisait la voiture. Mais tout à coup une réflexion soudaine vint me frapper ; je pensai qu’en faisant le mort, je serais sans doute laissé par les brigands, avec les cadavres de mes compagnons, et que je pourrais me sauver ensuite. Pénétré de cette idée, je pris un mouchoir : je l’imbibai du sang qui remplissait le fond de la voiture, j’y trempai les mains, et je m’en couvris la figure. Le dégoût que cette opération m’inspira eût été capable de me faire perdre connaissance, si l’anxiété que j’éprouvais ne l’eût emporté sur toute autre sensation. Je m’attendais à chaque instant à voir arriver le moment qui devait décider de mon sort. Enfin j’entendis le mot halte, et les mouvemens des brigands qui descendaient de cheval. — Placez les vedettes, dit l’un d’eux ; voyez si le capitaine revient, visitez la voiture et dépouillez les morts. — C’était pour moi le moment du courage et de la résolution. Je sentis bientôt une main se poser sur ma tête et saisir mes cheveux qui étaient longs et bouclés. Je comprimais ma respiration, dans une angoisse terrible ; car celui qui me tenait était sans doute prêt à me poignarder au moindre signe d’existence que je donnerais. Quoi qu’il en soit, il me souleva et fouilla mes poches, où il prit plusieurs pièces d’or. Il chercha ensuite si je n’avais pas une de ces ceintures où les voyageurs portent quelquefois des sommes considérables. N’en trouvant pas, il me donna un grand coup du plat de sa main ouverte sur la figure, et me précipita de la portière sur l’herbe, où je tombai en laissant aller mes membres,