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VOYAGE EN NORVÉGE.

nous élevâmes ainsi, presque perpendiculairement, pendant l’espace d’un mille de chemin, nous cramponnant aux buissons et aux saillies de rochers. Ce fut ainsi que nous parvînmes à la cascade ; moins fameuse sans doute que les phénomènes du même genre qui ont été décrits tant de fois, elle offre sans contredit les mêmes beautés que semblent accroître la profonde solitude que l’on vient de parcourir, et l’aspect âpre et sauvage des alentours. Le frémissement des eaux, qui fait presque croire au voyageur que la terre tremble sous ses pieds, les teintes mouvantes qui colorent l’écume jaillissant du fond de l’abyme, et la hauteur du précipice qu’on voit à ses pieds, pénètrent l’ame d’une impression profonde, que je ne me rappelle point avoir ressentie auprès des plus belles cascades des Alpes. »

Il monta ensuite le Snihattan, la plus haute montagne de la Norvége, et à laquelle on donne 7500 pieds d’élévation au-dessus du niveau de la mer.

« On est surpris, dit-il, de voir jusqu’à quelle hauteur dans la montagne se trouvent les terres cultivées. Des champs verdoyans et couverts de graminées touchent aux neiges, et l’on dirait que les paysans labourent dans les nuages. Au-dessous des champs se trouve une ceinture d’ifs et de rochers dominés par des neiges éternelles. Pendant notre ascension, le ciel assez obscur nous permit difficilement de distinguer le sommet du Snihattan, que nous nous proposions d’atteindre. Après avoir quitté la région cultivée, nous entrâmes