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TABLEAU des îles de la mer Blanche, avant et depuis l’insurrection grecque.

DÉSIGNATION
DES ÎLES PAR LEURS NOMS,
vulgaire, ancien et turc
.
FORMES
DE LEUR ADMINISTRATION,
et autorités desquelles elles dépendent spécialement.
POPULATIONS. PRINCIPALES PRODUCTIONS
NATURELLES ET INDUSTRIELLES.
OBSERVATIONS.
SAMOS, (Samos, Susam).
Malikianè ou Arpalik (apanage) du Cheïk-hul-Islam (le mufti). Elle était gouvernée par un officier choisi et nommé par l’apanagiste. Cet officier présidait aux délibérations des primats. L’administration intérieure de l’île était d’ailleurs tout-à-fait entre les mains des chrétiens qui jouissaient de beaucoup de priviléges et de liberté, que les apanagistes ont toujours respectés avec la plus grande attention.
» Grecque.
Vins, fruits de toute espèce, grains, huile, pays riche et extrèmement fertile.
L'une des premières îles insurgées.
Elle se maintient dans l’espoir d’assurer son indépendance ; menacée en 1824 d’essuyer le sort de Chio, elle s’était préparée à résister. On prétend qu’elle n’a échappé à une sanglante conquête qu’à la prière et aux démarches du Cheikh-ul-Islam, peu jaloux de voir ce riche apanage réduit à l’obéissance, à la manière de Scio et d’Ipsara.
SCIO, (Chios, Sakyz).
Apanage d’une sultane, sœur de sultan Selim iii, morte en 1824. Gouvernée par un pacha à deux queues ou un Mutecelim qui est en même temps Muhacyl (collecteur des revenus de l’apanagiste). Les soixante villes à mastic sont sous les ordres immédiats du Sakyz-Emini (l’intendant du mastic) qui recueille les redevances de cette gomme précieuse, et veille à la protection dont doivent jouir les cultivateurs du mastic. Ces villages de grands priviléges et se gouvernent par des primats que chaque village choisit annuellement.
La ville a deux primats catholiques (latins) et trois grecs. Ces derniers commandaient aux Latins, et leur faisaient faire tout ce que la communauté grecque leur prescrivait. Lois somptuaires très-sévèrement exécutées, afin de réprimer le luxe et la coquetterie des Chiotes. Les villages qui ne cultivent pas le mastic ont leurs primats séparés, et règlent leurs comptes avec le Muhacyl. Celui-ci réside au château ainsi que les autorités turques, tous les Musulmans et les Juifs. L’île de Scio est obligée de payer une redevance particulière au Capitan pacha ; elle porte le nom de Thaam ïè (pour la bouche de S. A.}.
Turcs et Juifs. Grecs et Catholiques.
Fruits de toute espèce et d'une excellente qualité, telles qu’oranges, citrons, raisin, olives et mastic.
Les Sciotes sont les meilleurs jardiniers de l’Empire ottoman ; on les recherche avec soin dans les maisons des seigneurs turcs.
L’industrie manufacturière surtout était naguère très-active, très-étendue et très-variée. Commerce considérable en étoffes d’or, d’argent, soieries de toute espèce, velours, galons. Académie florissante, etc.
Restée long-temps étrangère à l'insurrection, Scio se souleva en 1822. Plus tard elle fut prise d'assaut et horriblement saccagée. Tous les habitans qui ne purent s’enfuir, furent réduits à l’esclavage et dispersés de tous côtés par les vainqueurs. De 90 à 100,000 habitans, il ne reste aujourd’hui que 13 à 14,000 âmes. Elle commence pourtant à sortir de ses ruines, grâce à la sage administration du pacha qui la gouverne. Les villages à mastic, en général, ont été à l'abri des vexations et du sac exercés par les Osmanlis.
Scio a été cédée aux Turcs en 1540. Les Vénitiens la reprirent en 1694 à l’aide des latins, mais ils la perdirent l’année suivante. Depuis 1695 les catholiques ont perdu la prépondérance qu’ils avaient conservée jusqu’alors pendant un siècle, et les Grecs qui favorisèrent le retour des Turcs en haine des catholiques, en furent récompensés aux dépens des latins, qu’ils ont depuis maintenus dans l’abaissement et dans la contrainte.