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ANCIEN EMPIRE MOGOL.

chaque. Je peux dire, au moment où j’écris, que tout l’or et les joyaux renfermés dans ma maison sont encore sous sa seule et entière direction. Cette princesse possède en effet toute ma confiance, et j’avoue sans détour que j’ai mis à la disposition de sa famille, déjà dotée si richement, la fortune entière de mon empire. J’ai fait le père mon Dewan[1], le fils, mon lieutenant-général, avec des pouvoirs illimités, et la fille la compagne inséparable de toutes mes pensées. »

Nous ne passerons pas sous silence les ordonnances que ce prince rendit sur un sujet qui excite vivement aujourd’hui l’attention publique. On pourrait croire qu’elles ont servi de règle à la conduite du gouvernement anglais dans l’Inde. « Quant à l’usage, dont les veuves des Indous ont donné l’exemple, de se laisser brûler sur le bûcher de leurs maris, j’ai d’abord prescrit que toute femme qui avait des enfans devait vivre pour eux, lors même que la douleur lui commandait de mourir. J’ai ordonné depuis que dans aucun cas on ne permît cette pratique, lorsqu’il y avait la moindre apparence de contrainte, quelles que fussent les opinions du peuple. Il n’eût pas été sage, sous d’autres rapports, de les inquiéter dans leurs devoirs religieux, ni de leur faire violence en aucune manière. Quand je considère que l’Être suprême m’a fait l’image de sa bienfaisance sur la terre, et que sa miséricorde s’étend sur toutes les créatures, je crois indigne de mon caractère d’appeler la force à mon aide. Il est notoire que cinq parties de la population sur dix, sont composées d’Indous, adorateurs des images ; tout ce qui a rapport au commerce, aux manufactures et autres branches d’industrie lucrative, est leur partage exclusif. Ainsi, quand même tous mes désirs tendraient à les convertir à la vraie foi, je n’y parviendrais que par l’extermination de plusieurs millions d’hommes. »

Tels sont les principes de tolérance dont Djihân-Guir ne se

  1. Président du conseil.