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ANCIEN EMPIRE MOGOL.

et leur donna de nouveaux commandemens. Il ouvrit les prisons de son empire, et fit sortir de la forteresse de Gwalior seule, sept mille détenus, dont quelques-uns y gémissaient depuis quarante ans. On se fera une idée du nombre de malheureux délivrés par sa clémence, quand on saura qu’il y avait dans l’Indostan deux mille quatre cents forteresses destinées au même objet, non compris celles du Bengale.

Djihân-Guir donne une longue description de la ville impériale d’Agra, située sur la rivière Djemna, et conclut en disant qu’il ne connaît pas au monde de cité qui lui soit comparable pour la grandeur ni pour le nombre des habitans. Un de ses ornemens était l’immense jardin de Gul-Efchân (jardin des fleurs), qui devait son origine à l’empereur Baber, et renfermait tout ce qu’il y avait de rare en fleurs et en fruits. Il est curieux de trouver au nombre des fruits exotiques qu’il dit avoir été introduits par son illustre aïeul, l’ananas, l’un des plus délicieux que produisit à ses yeux l’île des Frènguis (Portugais). Il ajoute que ce jardin était connu pour en avoir donné une centaine de mille en une seule saison.

Le tableau que l’auteur trace des établissemens royaux est au-delà de toute croyance. Les éléphans, les chameaux, les chevaux et les frais énormes de leur entretien excèdent tout calcul. Les premiers seuls y figurent pour douze mille, de taille et de force à paraître sur le champ de bataille. Mille plus petits servaient à transporter le grain et le fourrage destinés aux précédens. Cent mille autres portaient les litières des dames de la famille impériale, les bagages de l’empereur et l’équipage de camp. Nous croyons, avec le savant traducteur anglais, que la personne qui a copié le manuscrit s’est fait un jeu d’exagérer le nombre des éléphans et les sommes énormes nécessaires à leur entretien.

Quoiqu’il surpassât en pompes et en richesses tous les souverains contemporains, Djihân-Guir ne pouvait se flatter d’être plus exempt qu’eux de soucis domestiques. Il eut aussi des