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LE CLERGÉ.

espagnol. Une autre cause ne paraît pas moins efficace : c’est la fréquentation habituelle du bas clergé et des moines non rentés avec le peuple ; car ce n’est que sur cette classe que le clergé est tout-puissant. Les autres, au contraire, éprouvent un éloignement qui, chez beaucoup de personnes, présente le caractère de l’aversion. Depuis long-temps, on ne voit presque plus de moines dans les maisons des gens aisés. Les ecclésiastiques éclairés n’ont pas plus de relations avec eux ; et il est à croire que, sans la révolution de 1820, les ordres monastiques auraient été tous graduellement supprimés, ou au moins réduits à un bien petit nombre de couvens.

L’inquisition a exercé peu d’influence en Espagne depuis le commencement de ce siècle ; elle y fut à peine aperçue. Le dernier grand-inquisiteur, D. Ramon de Arce, se montra un prélat fort éclairé ; sa tolérance était extrême. Il vivait en très-bonne intelligence avec le prince de la Paix, et avait su également gagner l’affection du Roi et de la Reine. D. Ramon de Arce, qui occupait l’archevêché de Saragosse, avec le titre de patriarche des Indes, embrassa la cause de Joseph et des Français. Il réside maintenant en France, où il se réfugia quelque temps avant la restauration de 1814.

Du reste, les évêques espagnols n’étaient pas généralement disposés à soutenir l’inquisition. Ils ne lui sont pas plus favorables aujourd’hui, et leur manière de penser à cet égard est facile à connaître ; nous avons vu des lettres adressées à un de nos généraux en chef, dans la dernière guerre d’Espagne, par plusieurs prélats qui sollicitaient avec mystère l’intervention de la France. Dans ces lettres, le rétablissement du tribunal du Saint-Office était regardé comme un des plus grands malheurs qui pût arriver au pays.

« … La France pourrait aujourd’hui nous rendre un grand service, écrivait l’un d’eux en 1825, si elle interposait son influence toute-puissante pour empêcher qu’on nous