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étrusque, celtique, hellénique. Enfin les analogies qu’on peut noter dans le développement des diverses procédures tiennent à l’élargissement du groupe social, c’est-à-dire, une fois encore, à l’imitation.

Toutes les ressemblances relatives au régime des personnes (chap. iii) s’expliquent également par cet accroissement continuel des relations de droit, accroissement en profondeur par l’admission de la femme, du plébéien, de l’esclave, accroissement en surface par l’agrandissement de la famille qui s’est annexée d’abord toutes sortes de parents fictifs et imaginaires, puis s’est étendue par degrés à tous les hommes par les idées de contrat, d’association, de patrie, de communauté religieuse, enfin d’humanité.

C’est cet élargissement de la société qui permet encore de comprendre, dans une certaine mesure, les similitudes de succession que présentent dans leur évolution le régime des biens, les obligations et la formation de l’idée de droit naturel. Pour le régime des biens (chap. iv), l’accroissement du nombre des propriétaires, d’une part, le droit reconnu par exemple aux filles à la succession des biens, et, d’autre part, l’accroissement des objets de propriété individuelle ou collective et leur éloignement croissant du propriétaire dans l’espace. Pour les obligations (chap. v), on rend compte par là de la proportion croissante des obligations contractuelles par rapport aux obligations non contractuelles, et des contrats consensuels par rapport aux contrats réels, lorsqu’il s’agit de relations entre étrangers. Pour le droit naturel (chap. vi), c’est dans l’assimilation des peuples au sein de l’empire romain que les jurisconsultes ont puisé l’idée du jus gentium et les Stoïciens, celle de la fraternité universelle.

Mais pour expliquer toutes les similitudes juridiques, l’imitation ne suffit pas, et il faut avoir recours à la logique sociale et à l’invention. C’est ce qu’on voit déjà en étudiant la succession des diverses procédures (chap. ii) : les inventions relatives à la domestication des animaux, puis des plantes, ayant substitué à la vie chasseresse la vie pastorale, puis la vie agricole, qui permet la fixation au sol et une plus grande densité de population, le résultat a été que la procédure s’est compliquée et l’organisation judiciaire régularisée et divisée. Ce rôle de la logique et son influence sur la nature et l’ordre des inventions est plus visible encore dans la succession des diverses sortes de propriétés (chap. iv). D’une part le progrès de l’invention crée de toutes pièces des biens nouveaux de plus en plus nombreux : navires, avec les inventions relatives à la navigation ; livres et journaux, avec les inventions relatives à l’imprimerie et à la librairie. D’autre part, il accroît le nombre de manières dont on peut posséder les biens anciens : avant toute invention pastorale et agricole, la seule manière de posséder une terre était d’y chasser. Or dans une certaine mesure les inventions coïncident spontanément, sans influence de l’imitation, et se suivent dans un ordre identique, parce que ce sont les seules solutions possibles, simples et aisées à concevoir, de problèmes que posent les besoins naturels de l’homme, toujours et partout identiques. Plus développée encore est la doctrine de M. Tarde sur l’influence de la logique quand il passe à la théorie des obligations (chap. v). Dans la théorie des obligations, problème