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des nombres mesurant ses actes, et la faire entrer dans le calcul, dans les formules algébriques qui posent et résolvent les problèmes de la mécanique.

Si nous appelons potentiel de vie le travail d’organisation dont le germe est dépositaire, peut-être notre langage deviendra-t-il scientifique, nous ne prétendons pas qu’il en deviendra plus clair : l’objet désigné n’en restera pas moins métaphysique tout comme l’action, à l’état dit potentiel, des autres forces de la nature. Par exemple : pendant la chute d’un corps nous assistons au travail de la pesanteur, et le déplacement du corps dissimule en quelque sorte, parce qu’il est visible, la nature métaphysique de l’activité accumulée qui le détermine. Mais si la chute du corps est arrêtée par un obstacle, par le sol, il n’y a plus phénomène, le corps ne se meut plus sans pourtant cesser de peser ; l’action de la pesanteur sur lui est devenue latente, elle ne se traduit plus dans l’espace par un déplacement ; le potentiel de pesanteur, l’énergie seule subsiste, et, à coup sûr, rien n’est plus métaphysique que cette puissance sans acte perceptible. Mais ce potentiel, bien qu’indéfinissable dans son essence intime, est mesurable par l’espace que parcourrait en une seconde le corps, s’il pouvait suivre, et suivre exclusivement, l’impulsion contrariée ; ce qu’il y a de métaphysique dans son essence est ainsi négligé sans inconvénient par le savant qui le mesure par ses effets et n’a besoin que de le mesurer. Le savant ne considère que les rapports des choses entre elles et ferme les yeux sur leur substance ; c’est pourquoi il lui suffit de pouvoir mesurer, la mesure n’étant qu’un rapport. Fermer les yeux sur la substance, ce n’est ni l’affirmer ni la nier ; il se contente de dire : j’ignore ce que c’est en soi que la pesanteur, l’affinité ou telle autre espèce de force, et je ne cherche pas à le savoir ; j’en étudie les manifestations sensibles ; les différences mesurables entre celles-ci me révèlent qu’il y a des différences dans les états impénétrables de leurs causes ; mais je ne considère pas ces états, qui par leur nature intime relèvent de la métaphysique.

Le principe de la vie, dans notre hypothèse, est donc, au même titre que la pesanteur, une force révélée par ses effets, ou dont l’action existe à l’état potentiel avant de se manifester au dehors, dans le milieu terrestre. Nous rencontrons ici une objection que nous avons déjà pressentie et qu’il importe de détruire, car elle tend à ébranler toute notre théorie. Il y a bon nombre de savants (le plus