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partie du système la plus élevée, mais aussi la plus obscure,… à ces hautes et mystérieuses questions, dont la solution claire et précise échappe à la raison humaine parce qu’elle est au-dessus de sa portée ». On ne peut pas interpréter Platon dans la langue de Pascal : pour Platon, comme pour Pythagore, comme pour Parménide et Zénon d’Élée, le point de vue philosophique est aussi le point de vue de l’explication rationnelle des choses, le point de vue de l’idéalisme. — D’ailleurs il apparaît clairement que M. Bénard n’attache aucune importance à la distinction de la méthode mythique et la méthode dialectique, lorsque, pour la commodité de l’exposition dogmatique, il partage la philosophie platonicienne en dialectique, physique et morale, division ignorée de Platon, et que les philosophes grecs adoptèrent seulement à partir de Xénocrate. — Nous voudrions l’aire dans la. physique, dans la morale et enfin dans la dialectique de Platon, aussi brièvement, mais aussi clairement que nous pourrons, le départ de l’élément mythique et de l’élément dialectique.

Physique. — Idées de matière et de cause efficiente. — Sous ce titre de physique, M. Bénard confond ce qu’il appelle la cosmologie, la psychologie et la théologie de Platon. S’il ne ménage ni à la psychologie ni à la théologie les termes d’admiration, il est sévère, en revanche, pour la cosmologie, ou du moins pour la partie scientifique de la cosmologie platonicienne. « Platon, écrit-il, n’attache qu’une importance médiocre à cette partie de son système ; il ne l’expose pas en son nom. — S’il y mêle parfois ses vues propres dans le détail, on voit qu’il n’y tient pas» (p. 215). — « Les difficultés, Platon les a senties, et c’est pour cela que son langage est obscur, enveloppé, énigmatique, et figuré, plein de métaphores et d’analogies» (p. 224). — « Ces explications qui feraient sourire la science moderne, Platon, il faut le dire, n’y attache aucune importance » (p. 234).

Nous voudrions protester contre cette sévérité, et en appeler à la « science moderne » elle-même de l’abus que fait M. Bénard de son prétendu témoignage. Il semble bien, en effet, que l’idée d’une mathématique universelle, d’une science dont l’objet est la réduction de la chose sensible à des relations intelligibles, soit une idée pythagoricienne et platonicienne ; et qu’il ne faille pas confondre avec la conception platonicienne de la science l’idée péripatéticienne et scolastique d’une science des genres et des qualités, science fausse que la renaissance des vraies traditions helléniques a détruite. — Surtout, il ne convient pas de confondre, avec M. Bénard, sous le titre commun de physique, ce qui, chez Platon, est tantôt purement dialectique, et objet d’une science absolue, tantôt hypothétique, seulement vraisemblable, et mythique. « La marche générale, écrit M. Bénard, n’est pas aisée à suivre dans le Timée. Platon commence par poser les bases et tracer l’ensemble. Il revient ensuite sur ses pas et entre dans le détail. L’astronomie, la physique générale et parliculière ; la composition des corps et leurs éléments., l’homme et l’organisation du corps humain sont les parties à parcourir sans nous y arrêter ». (P. 231-2.) Nous voulons bien dire avec M. Bénard que « Platon commence par poser les bases » ; mais la nomenclature qui suit est singulièrement confuse. Platon commence par tracer un tableau, mythique assurément, des sciences où nous avons appris à saisir,