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année, elle a été dès l’origine, et elle est restée le principal organe des sciences philosophiques en France. Elle a rendu, dans ce grand espace de temps, de très appréciables services. Elle a obligé les philosophes de suivre les travaux des savants ; elle a permis aux savants de lire les méditations des philosophes ; elle les a fait connaître les uns aux autres, et elle les a tenus également au courant des travaux du même genre qui paraissaient à l’étranger. On peut dire en vérité qu’elle a reflété très fidèlement dans son éclectisme hospitalier le mouvement des idées philosophiques. Et entre tant de louanges que son habile et zélé directeur a méritées pour une si longue action toujours attentive, peut-être n’en est-il pas à laquelle il attache plus de prix. En tout cas c’est un hommage que nous sommes heureux de lui rendre.

Ici on voudrait faire autre chose. Dans un cadre plus restreint on voudrait donner plus de relief aux doctrines de philosophie proprement dite ; on voudrait, laissant de côté les sciences spéciales plus ou moins voisines de la philosophie, ramener l’attention publique aux théories générales de la pensée et de l’action dont elle s’est détournée depuis un certain temps et qui cependant ont toujours été, sous le nom décrié aujourd’hui de métaphysique, la seule source des croyances rationnelles ; on voudrait non pas suivre le mouvement des idées, mais essayer de lui imprimer une direction. Et cette direction, on osera la définir.

Sans trop presser l’idée de la philosophie, on peut dire, en effet, qu’elle a toujours tenté, qu’elle se propose encore de remonter aux principes du savoir, puis de déterminer les conditions générales de l’existence, sinon de l’existence absolue, tout au moins de la réalité qui nous est accessible ; enfin de chercher soit dans la nature de la pensée, soit dans la nature de l’être, les principes de l’action ; théorie de la connaissance, théorie de l’existence, théorie de l’action, tel est son domaine. D’ailleurs la liberté de modifier ces termes pour les mieux approprier à des conceptions plus précises doit être réservée, aussi bien que la possibilité de réduire ces catégories à deux ou à une ou d’en déterminer autrement l’ordre de filiation, comme des conditions indispensables de l’originalité des systèmes. Ce qu’on veut remarquer seulement en circonscrivant d’une manière générale le domaine de la philosophie, c’est qu’il est distinct de tout autre, et que dans ce domaine la philosophie se suffit à elle-même.

Sans doute elle n’est pas étrangère aux sciences ; car d’une part