Page:Revue de métaphysique et de morale, supplément 5, 1908.djvu/11

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
11

seulement regretter que certaines réponses soient restées très vagues. Nous n’insisterons pas sur le contenu de cet ouvrage, parce que nous en avons déjà rendu compte partiellement (Revue de Métaphysique, janvier 1908, p. 22-23 du Supplément et juillet 1908). Nous signalerons seulement deux points : le génie mathématique semble être précoce : sur 93 mathématiciens avant répondu, 78 ont manifesté leur goût pour cette science avant seize ans, et 11 entre seize et dix-huit ans. Le goût des mathématiques parait aussi être héréditaire dans certains cas : mais ici, les réponses nous paraissent demander à être interprétées, et la conclusion est assez douteuse. Nous regrettons seulement qu’on n’ait pas utilisé davantage les correspondances des mathématiciens morts, où peut-être on aurait trouvé des passages instructifs sur leur méthode de travail : la lettre de M. Loria répond en partie à ce désir. De toute façon, cette enquête a été une besogne sinon très fructueuse en résultats, du moins utile et utilisable pour tout psychologue.

Ein Beitrag zur Geschichte der neueren franzœsischen Philosophie. Die Lehre vom Zufall bei Emile Boutroux, par M.  le Dr  Otto Boelitz. 1 vol. in-12 de 120 p. Quelle et Meyer, Leipzig, 1907. — Dans cet opuscule, qui fait partie des Abhandlungen zur Philosophie und ihrer Geschichte éditées par le professeur R. Falckenberg, d’Erlangen, l’auteur résume la doctrine de M. Boutroux, et en particulier son concept de la contingence. Le résumé est clair et consciencieux, appuyé de citations nombreuses bien choisies et classées avec discernement. M. Boelitz semble en général très au courant de la philosophie française moderne dont il apprécie fort équitablement les efforts en faisant ressortir qu’elle s’est appliquée à conserver le lien le plus étroit avec la science, alors qu’en Allemagne, au contraire, la philosophie, dès après Kant, s’en détourne. — En recherchant la filiation des idées, M. Boelitz mentionne l’influence de Kant, de Hume et de Mill, mais constate que M. Boutroux diffère notablement du premier en apposant à son criticisme rationaliste un empirisme modéré par la critique, et que les conceptions du philosophe français vont bien au delà de celles de l’empirisme anglais. — Parmi les devanciers français, M. Boelitz attribue peut-être une influence trop grande à Auguste Comte : en dépit de l’admiration de M. Boutroux pour Comte, il nous semble bien que les analogies entre la classification positiviste des sciences et la hiérarchie établie par l’auteur du traité De la contingence des lois de la nature sont plus apparentes que réelles et profondes. D’autre part, M. Boelitz fait trop peu de cas de l’influence de Renouvier. — M. Boelitz ne formule, à l’égard de son auteur, qu’une seule réserve, celle d’avoir trop souvent conçu l’état actuel de la science comme quelque chose de définitif. Par contre, il admire les qualités d’exposition de M. Boutroux, son profond savoir scientifique, la rigueur de sa critique. Il estime que sa théorie de la liberté est « moins artificielle et plus satisfaisante que celle de Kant » et que « par sa doctrine de la contingence, il a trouvé la seule voie juste d’une paix durable entre la foi et le savoir ». Signalons encore, dans une note, des données biographiques et bibliographiques brèves, mais suffisamment complètes.

Essays philosophical and psychological, in honour of W. James, by his colleagues at Columbia University, 1 vol. in-8 de 610 p. Longmans et Green, 1908. — Composés en l’honneur de W. James, il est naturel que ces essais soient pénétrés de son influence et, dans l’ensemble, fidèles à la doctrine. Ne pouvant les passer un à un en revue, nous ne dirons rien des mémoires psychologiques et moraux, malgré l’intérêt de quelques-uns, parce que les sujets en sont très disparates. Il est remarquable, au contraire, que tous, ou à peu près, les mémoires de philosophie générale portent sur le problème du réalisme et que leurs auteurs s’accordent à se dire réalistes mais il apparait aussi, après les avoir lus, qu’ils n’entendent pas tous la réalité au même sens ; que rien n’est plus voisin de ce qu’on appelle d’ordinaire idéalisme et phénoménisme ; et que la pensée de beaucoup d’entre eux reste bien décidément, malgré le besoin qu’ils éprouvent de reprendre sans cesse la question, hésitante et équivoque n’en pourrait-on pas dire autant, d’ailleurs, de cette de W. James lui-même ? La plupart estiment en somme que la connaissance n’a d’autre fonction que de préparer et de guider l’action ; ils croient devoir affirmer une réalité objective dans la mesure même où elle leur parait nécessaire à l’action, et où par suite elle est affirmée par le sens commun : le problème proprement métaphysique ne les intéresse pas, c’est ce que déclare assez nettement M. Woodbridge (Perception and Epistemology) : « quels que soient les problèmes d’épistémologie, mais de sciences naturelles et de connaissance positive » (p. 166). Quant