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important qui, naturellement ( « cela est un point acquis en science sociale », nous dit-on), est la famille. D’où la supériorité des peuples anglo-saxons. Heureusement la France est le peuple le plus proche de ceux-ci, parce qu’elle est très particulariste et que tout se ramène au fond à cette question : former des hommes. On peut se demander encore, après lecture, si la définition de Le Play est ainsi suffisamment précisée.

Essai de psychologie nouvelle. La genèse de l’esprit humain, par Camille Milvaux. 1 vol. in-8 de 165 p., Schleicher, Paris, 1908. — Une grande déception est réservée aux lecteurs de ce livre au titre plein de promesses. Nouvelle, la psychologie de M. Milvaux l’est surtout par l’ignorance qu’elle révèle chez son auteur de la manière dont se posent les problèmes, et l’apparente simplicité des solutions qu’il en donne ne vient que d’une méconnaissance complète des difficultés qu’ils soulèvent. Aussi n’est-il pas bien sûr que la manière de procéder de cet auteur l’amène à des résultats supérieurs à ceux des philosophes anciens pour lesquels il manifeste bien peu d’estime, et dont les théories, « principalement les plus en vogue, celle de Platon par exemple, résultent davantage des suggestions de l’atavisme que d’une vue exacte de la réalité » (p. 2). « L’homme vit de la vie psychologique de la bête », des quatre vies qui la composent, la vie pratique, la vie morale, la vie tactique et la vie idéalisatrice ; elle n’en diffère que par ce fait que « la raison…, mode second du discernement, parvient… à supplanter peu à peu les instincts primordiaux » (p. 154). Voilà l’idée essentielle du travail de M. Milvaux, celle sur laquelle il revient avec le plus de complaisance, ainsi que sur la suivante : la vie psychologique n’est qu’une manifestation de la vie organique. Partant de ces deux principes, il entreprend la description de l’esprit, passant successivement en revue (car il rejette — à juste titre d’ailleurs, mais pour la remplacer par une classification tout aussi arbitraire — la vieille division en trois facultés) le sentiment religieux, le sentiment moral, le sentiment littéraire, l’instinct tactique, la faculté d’imitation, le sens du ton et de la forme.

Ce livre est un excellent exemple de ce que peut donner, en psychologie, un travail d’amateur à tendances pseudo-positivistes.

Psychologie des Neurasthéniques, par Hartenberg, 1 vol. in-8o, Paris, Alcan, 1908. — L’auteur étudie surtout les troubles psychiques de la neurasthénie : son exposé est clair et facile à suivre ; il rattache la neurasthénie à l’épuisement organique dont les symptômes fournissent précisément les symptômes de la neurasthénie et rejette la théorie de Dubois et Déjerine qui tend à faire de la neurasthénie une maladie par représentation. Il combat également l’identification proposée par Janet de la neurasthénie et de la psychasthénie : il signale en passant que les désordres mentaux (obsessions, phobies, etc.), fréquents dans cette dernière, ne relèvent point de la neurasthénie vraie, et qu’ainsi il faut concevoir la psychasthénie comme une neurasthénie des prédisposés.

La Psychologie quantitative, par van Biervliet, 1 vol. in-8o de 218 p., Paris, Alcan, 1907. — Ce livre contient trois études, claires et bien informées, d’histoire de la psychologie : la psychophysique, les controverses provoquées par l’œuvre de Fechner, les corrections et les reconstructions de la psychophysique. La psychophysiologie : très bonne étude sur les temps de réaction. La psychologie expérimentale : les enquêtes, les recherches de laboratoire. Utile travail historique et critique.

Les Croyances populaires (avant-propos par Maurice Vernes), par Élie Reclus, 1 vol. in-16 de 277 p., Paris, Giard et Brière, 1908. — Cet ouvrage est le premier d’une série publiée après la mort d’Élie Reclus par Maurice Vernes, d’après les leçons de Reclus à l’Université nouvelle de Bruxelles. Cette série doit former un ouvrage d’ensemble sur la Religion et les Religions. Le présent ouvrage est consacré à la survie des ombres : il est de lecture pittoresque et agréable. On peut regretter l’absence complète de références, l’amalgame de traditions et de pratiques probablement très différentes par leur origine et leur fonction, la synthèse parfois trop rapide.

Enquête de l’ « Enseignement mathématique » sur la méthode de travail des mathématiciens, publié par H. Fehr, avec la collaboration de Flournoy et Claparède, 1 vol., in-8 de 126 p., Paris, Gauthier-Viliars, 1908. L’Enseignement mathématique a réuni dans ce volume les matériaux d’une longue enquête sur la méthode de travail des mathématiciens, enquête poursuivie depuis 1905 et qui vient seulement de prendre fin. L’enquête comprend trente questions, dont quelques-unes très détaillées, et une centaine de mathématiciens, presque tous vivants, ont été appelés à y répondre. Il y a donc là pour le psychologue une riche collection de matériaux et une source précieuse de réflexion ; on peut