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19 dent, leur dépendance systématique, leur opposition réciproque, leur place dans la vie morale. Les passions de l’àme en particulier (2e partie) supposent l’examen des passions concupiscibles (amour, haine, désir, dégoût, joie et tristesse), et l’examen des passions irascibles (espérance et désespoir, crainte, audace, colère). En comparant la doctrine de saint Thomas à celles de ses devanciers, l’auteur établit qu’elle trouve ses sources dans les œuvres dt>. Jean Damascène, Némesius, le pseudoDenys, Augustin et Aristote. La source de beaucoup la plus importante .n’est d’ailleurs pas Augustin, bien qu’on l’ait prétendu, mais Aristote. Sur chacun des points que nous avons signalés, l’auteur établit solidement ses conclusions. Les autorités de saint Thomas sont relevées, classées par ordre d’importance (en tenant t compte du nombre et de la valeur des citations au point de vue de leur contenu); les textes d’Aristote et de saint Thomas sont comparés dans le détail, ce qui permet d’établir exactement quel ordre et quel degré d’élaboration le théologien fait subir à la pensée de son prédécesseur. La quantité des matériaux qui sont ici rassemblés, la précision avec laquelle ils sontanalysêsctinterprétés, ne permettent t guère (le croire qu’on puisse désormais commenter la partie de la Somme qui traite des Passions, sans avoir le livre de M. Meier sous les yeux. The Meaning of God in human Experience, a philosophie sludy of relit/ion, par William Krnest Hocking, 1 vol. in-8, de xxxiv-5S6 p., Londres, Henry Frowde, 1912. Le livre de M. Hocking est un livre vigoureux, riche d’idées, écrit dans un style ferme et coloré, un livre, croyons-nous, important, tout au moins significatif; il exprime d’une façon particulièrement nette la volonté d’objectivité et d’universalité, le réalisme et le catholicisme de la philosophie nouvelle en Amérique. Sans doute nous aurions à faire des réserves sur l’intellectualisme intransigeant de l’auteur qui identifie le sentiment et la pensée, qui admet que la réalité est toujours divisible et séparable selon nos concepts, sur son monisme optimiste, sur l’emploi qu’il fait de l’idée de totalité, sur bien d’autres points encore. Pour exposer les théories deM. Hocking, il faut les opposer d’abord au subjectivisme sentimental qui ne saurait expliquer que la religiosité, non la religion. Car on ne peut séparer, dit-il, le sentiment de l’idée; un sentiment fort croit nécessairement à son objet, à la réalité de son objet; si l’on supprime l’idée et l’affirmation de l’objectivité, on supprime le sentiment lui-même; en particulier, le sentiment religieux est avant tout une façon de concevoir le monde, – De même qu’il s’oppose à ce subjectivisme sentimental, M. Hocking s’oppose au subjectivisme volontariste du pragmatisme l’esprit religieux veut qu’il y ait dans son objet quelque chose qui soit extérieur et supérieur à l’esprit. Ce dont nous avons besoin aujourd’hui, c’est d’une sincérité plus profonde, c’est d’un enracinement de nos idées et de nos sentiments dans la réalité solide. Nous savons que le concret ne peut sortir que du concret, que l’historique ne peut sortir que de l’historique, et que la religion est un fait et une idée en même temps qu’un sentiment et une volonté. La philosophie de la religion. devra être réaliste en même temps qu’idéaliste et mystique. Nous ne devrions pas chercher l’absolu par une méthode réflexive à l’intérieur de nous-mêmes. Le Cor/ilo de Descartes, le moi transcendental de Kant, le sujet de Berkeley, ne justifient pas l’expérience car, celle-ci supprimée, ils continueraient à exister. Dieu doit se trouver à l’intérieur de l’expérience, car elle est une région de contact perpétuel avec la réalité. C’est seulement si nous trouvons Dieu dans l’expérience, tout proche de la sensation, que nous aurons cette idée littérale de Dieu qui est nécessaire à la religion. .M. Hocking, pour nous amener jusqu’à cette idée, montre que nous saisissons les choses comme connues à la fois par nous et par un autre esprit, que toute connaissance est une communion, et que nous avons conscience que les choses mêmes que nous ne connaissons pas sont connues par cet autre esprit. Or l’idée d’une expérience en commun ne serait pas imaginable si une telle expérience n’était pas réelle; de fait, l’idée que j’ai d’un autre esprit est mon expérience de cet autre esprit, de même que l’idée que j’ai de moi-même est une expérience de moimème; et je ne puis savoir qu’un objet est commun à mon esprit et à un autre qu’en saisissant cet objet dans le fait même qu’il est connu par cetautre. Or cet autre qui connaît tout ce que nous connaissons et qui connait plus de choses que nous, ne peut être que Dieu. Toute connaissance est une communion avec l’esprit divin. Nous ne possédons pourtant pas jusqu’ici la preuve de Dieu, et nous la posséderions moins encore si nous partions de la considération de la nature ’car ce serait être infidèle à l’esprit même de la religion. Ce qui constitue le mouvement de l’esprit vers Dieu, c’est