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aujourd’hui, et le manque d’une certaine ordonnance dans l’exposition et la conduite de la pensée.

English Philosophers and Schools of Philosophy par Andrew Seth, 1 vol. in-8 de 372 p. London. Dent and sons. — M. Seth n’a pas voulu nous donner une histoire de la philosophie anglaise, mais plutôt une série d’études sur les principaux philosophes de l’Angleterre. Dans l’introduction, il caractérise la philosophie anglaise en général ; elle est expérimentale, épistémologique et pratique. Quelques pages du début de chacune des parties mettent en relief ces traits principaux des philosophies du xviie, du xviiie du xixe siècle. — Les portraits des philosophes sont soigneusement tracés ; et toujours, les principes de leurs doctrines sont clairement exposés. On peut pourtant se demander si l’auteur n’aurait pas pu plus insister sur la philosophie scientifique de Hobbes, si les raisonnements de Hume dans le Treatise sont suivis dans toute leur complication, si Berkeley, dont la doctrine est d’ailleurs analysée avec finesse, doit apparaître seulement comme un philosophe critique, et non pas, en même temps, comme un constructeur. On regrette que M. Seth n’ait pas plus souvent montré les liens qui unissent la philosophie anglaise soit aux philosophies antiques, soit aux philosophies de France et d’Allemagne et qu’il en ait fait une philosophie insulaire. Enfin la façon dont sont groupés les philosophes du xixe siècle n’est guère satisfaisante : (successeurs de Hume, successeurs des Écossais, idéalistes). Il reste que le livre est élégant, clair, et plein de choses. — La conclusion, qui montre bien le mouvement de la philosophie anglaise aujourd’hui, est intéressante. M. Seth étudie les caractères distinctifs de la philosophie anglaise contemporaine ; « confluence » des deux courants de la philosophie anglaise et de la philosophie américaine, influence des progrès de la psychologie, réaction contre l’intellectualisme. Cette réaction, qui peut se noter même dans l’école idéaliste, prend des formes diverses : empirisme, nouveau réalisme, pragmatisme. Toutes ces doctrines veulent opérer un rapprochement entre la philosophie et la science. Enfin on insiste sur la volonté et la personnalité. M. Seth, qui est l’auteur d’ouvrages importants dirigés contre le monisme rigide de certains néo-hégéliens (A Study of Ethical Principles, Freedom an ethical postulate) a poussé la modestie et le souci de son rôle d’historien, jusqu’à ne pas parler ici en son nom en faveur d’une doctrine de liberté ; mais la citation finale qu’il emprunte à W. James nous révèle sa pensée.

The Philosophy of Schiller in its historicals Relations, par Emil Car Wilm, Ph. D. 1 vol. in-16 de viii-183 p. Boston, J. W. Luce and C°, 1912. M. Wilm n’a pas voulu faire de la philosophie de Schiller une étude technique : il s’est surtout proposé d’éclairer par l’exposé de cette philosophie le caractère de Schiller et ses grandes œuvres littéraires : aussi ne s’est-il pas astreint à commenter de près les écrits d’esthétique qui ne contribueraient pas directement au but qu’il s’est proposé. Bien que sur plus d’un point ses interprétations soient neuves et curieuses, M. Wilm ne revendique pas en premier lieu le mérite de l’originalité, et c’est délibérément qu’il présente au public anglais, avec le premier résumé en cette langue de la philosophie de Schiller, les résultats des travaux qui y ont été consacrés en Allemagne et en France. Dans l’utile et copieuse bibliographie qui termine son livre il y a lieu de signaler quelques lacunes particulièrement regrettables : la Poétique de Schiller de V. Basch, Schiller als Denker de B. C. Engel, et Schiller und das Unsterblichkeitsproblem, de Karl Wolff. — Après des considérations générales sur les analogies et les traits distinctifs de la poésie et de la philosophie, et une brève caractéristique de la personnalité de Schiller, M. Wilm montre que la méthode historique et génétique est nécessaire pour résoudre les graves difficultés et les apparentes contradictions que nous offrent les ouvrages philosophiques de Schiller. Il expose ensuite rapidement le leibnizianisme, et la doctrine de Shaftesbury et du « sens moral » dont Leibniz a subi l’influence dans sa jeunesse et dont il s’est inspiré dans sa dissertation de 1779 sur la Philosophie de la Physiologie et dans ses œuvres pré-kantiennes. Les premiers écrits philosophiques de Schiller représentent les idées de l’Aufklärung ; mais les préoccupations morales y apparaissent déjà dominantes ; le dualisme entre la nature et l’esprit, entre les éléments sensitifs et les éléments rationnels dans l’homme y est nettement affirmé ; mais en même temps il y est fait effort pour réhabiliter la vie affective, pour justifier les sentiments et les instincts, et pour réconcilier, soit au moyen d’un agent médiateur métaphysique, soit au moyen de l’art, les deux natures qui coexistent dans l’homme. — On voit que l’analyse fine et pénétrante que fait M. Wilm des premières œuvres