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devient alors une dialectique » (p. 274).

Les deux premières parties de l’ouvrage constituent une critique de l’évolutionnisme « mécaniste » et de l’évolutionnisme « romantique » et, comme au fond ce que M. René Berthelot reproche à la doctrine « mécaniste » de Spencer, c’est d’avoir des origines « romantiques » encore, comme d’ailleurs, dans ce numéro même de la Revue, M. René Berthelot reprend, avec plus de détails, à propos de la philosophie de Nietzsche, sa discussion de la notion « romantique » de vie, nous pouvons nous dispenser d’analyser ces deux premières parties.

La troisième partie traite « de quelques-uns des prédécesseurs et des disciples de Platon. — Les philosophes présocratiques s’attachent tous à résoudre l’opposition entre les deux points de vue scientifiques de l’école pythagoricienne (arithmétique et statique) et ionienne (qualitatif et évolutionniste), et les deux problèmes soulevés par ce conflit doctrinal : « Quels sont les rapports de la quantité et de la qualité ? Quels sont ceux du continu et du discontinu ? », jusqu’au jour où, « par une théorie idéaliste du continu mathématique », Platon « les a résolus l’un et l’autre et… a relevé tout entier de ses ruines, pour l’appuyer sur des assises plus profondes et le parer d’une splendeur nouvelle, l’édifice effondré du pythagorisme primitif » (p. 157). — Étudiant ensuite la loi du ternaire chez Proclus et Plotin, M. Berthelot essaie de nous montrer que Proclus a restauré, contre Plotin, la vraie doctrine platonicienne. « L’objet de Plotin, comme celui d’Aristote, c’était de chercher la raison d’être de toute réalité et de toute individualité dans quelque réalité première, seule de son espèce, origine de toutes les réalités et de toutes les individualités imparfaites ; l’objet de Proclus comme celui de Platon, c’est de chercher les conditions idéales communes à tous les êtres de l’univers : et à ces conditions, Proclus montre que les hypostases de Plotin sont soumises comme le reste ». — La philosophie de Hegel, en troisième lieu, nous est présentée comme ne constituant pas un « panlogisme », et comme différant, par exemple, du « panlogisme » leibnitien : il y a, suivant Hegel, « dans la Nature, dans l’Histoire, dans l’Esprit », une opposition réelle entre « l’accidentel et l’essentiel » (p. 185). « L’idéalisme dynamique de Hegel pose un certain rapport de la Matière et de l’Esprit à l’Idée, c’est-à-dire à l’unité rationnelle des formes essentielles de l’Être : mais il ne résout pas les formes essentielles et à plus forte raison les formes accidentelles de l’Être dans une simple combinaison de concepts » (p. 191). — Enfin l’auteur retrouve dans les idées de Renan comme un écho (bien confus peut-être) de ce nouveau platonisme, dialectique et évolutif, qu’il se propose d’instaurer.

Deux critiques pour finir. Première question. L’idée dialectique et l’idée évolutive apparaissent à M. René Berthelot comme inséparables ; mais en quel sens ? Est-ce en celui-ci que la dialectique, une idée étant posée, nous oblige à en poser une autre, à « passer » à une autre, et ainsi de suite à l’infini ? Il s’agit alors d’une évolution purement logique, intérieure au monde des idées. Ou bien est-ce en ce sens que la dialectique, entre autres idées, nous oblige à poser l’idée de temps, et par suite l’idée d’un ordre d’évolution où les idées, ou les êtres, se succèdent l’un a l’autre, d’une manière qui n’est plus purement logique, où il y a, au sens propre du mot, devenir et changement, l’univers spatial et temporel étant, en quelque manière, extérieur au monde des idées ? Il faudrait choisir. Seconde question. Dans sa morale M. René Berthelot déclare expressément rejeter le finalisme, et s’opposer par là à Platon, dont il prétend renouer, à tant d’égards, la tradition. Mais comment définit-il la manière dont Platon conçoit le rapport du monde du devenir au monde des idées ? Il semble lui reprocher surtout (p. 279) l’indécision de ses vues. Tantôt Platon dit ceci, tantôt Platon dit cela : «… tantôt lorsqu’il traite de la société juste, de la cité idéale, la plus une et la plus stable possible, il déclare que la réalisation en dépend d’une rencontre très complexe de circonstances, d’un accident heureux, impossible à prévoir ». Puis M. René Berthelot ajoute : « Ce sont là autant de propositions que nous ne pouvons admettre : la doctrine platonicienne est un finalisme mathématique, et pour nous le finalisme est aussi inacceptable sous une forme mathématique que sous une forme qualitative ». Or nous ne voyons pas trace de finalisme dans la phrase que nous venons de citer, et nous ne voyons pas en quoi l’attitude philosophique qui s’y trouve définie diffère de celle qu’adopte M. René Berthelot, en terminant, pour son propre compte. « En même temps











que l’Esprit devient plus clairement conscient en elles, les âmes individuelles complètent l’univers en y déterminant des groupes de rapports ordinaux, de plus en plus variés, des équilibres nouveaux, des harmonies supérieures, à la fois par la richesse et par la simplicité, à celles que l’univers inconscient réa