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Il nous semble que le rapprochement de ces textes n’établit pas toujours la thèse de l’auteur : sur la question de l’extase par exemple nous voyons chez Philon une théorie basée surtout sur le prophétisme juif et qui est au fond assez dissemblable de celle de Plotin.

L’infinité divine depuis Philon le Juif jusqu’à Plotin, par H. Guyot. 1 vol. in-8 de 259 p., 5 fr., Paris, Alcan, 1906. — Étude claire et commode sur la grande question de l’unité Alexandrine. L’auteur évoque la thèse traditionnelle de l’origine juive de cette notion, il la considère comme étrangère à l’esprit grec amoureux de mesure ; il l’étudie chez Philon sous la triple forme de l’infini en soi, des puissances intermédiaires et de l’extase. Il la suit chez les Neopythagoriciens et chez Plotin. Ce travail est agréablement présenté et soutenu de textes judicieusement choisis : on regrette de le trouver parfois un peu rapide et superficiel.

Systematische Philosophie, par W. Dilthey, A. Riehl, W. Wundt, W. Ostwald, H. Erbinghaus, H. Eucken, Fr. Paulsen, W. Münch, Th. Lipps, 2 vol. in-4, 432 p., Berlin et Leipzig, Teubner, 1907. — La Revue de Métaphysique et de Morale se réserve de consacrer prochainement un article de critique étendu à l’important volume qu’elle vient de recevoir de la librairie Teubner. Ce volume est le sixième de la première partie de la vaste encyclopédie entreprise sous la direction de M. Paul Hinneberg, sous ce titre général : Die Kultur der Gegenwart, ihre Entwickelungl, ihre Ziele. Il ne s’agit de rien moins que d’établir le bilan de la science et de la pensée contemporaine, dans tous les domaines : sciences positives, histoire, art, philosophie, en divisant la tâche en tranches assez restreintes pour pouvoir ne les confier qu’à des compétences indiscutées.

Le volume que nous avons sous les yeux est signé, on le voit, des noms les plus considérables de la philosophie allemande contemporaine. La simple énumération des chapitres suffira à en faire pressentir l’intérêt : I. Généralités : L’Essence de la philosophie, par W. Dilthey ; – II. Les disciplines spéciales. 1. Logique et théorie de la connaissance, par Al. Riehl ; 2. Métaphysique, par W. Wundt ; Philosophie de la nature, par W. Ostwald ; Psychologie, par H. Ebbinghaus ; Philosophie de l’histoire, par R. Eucken ; Éthique, par Fr. Paulsen ; Pédagogie, par W. Münch ; Ethique, par Th. Lipps. — III. La tâche à venir de la philosophie, par Fr. Paulsen. — Bibliographie et index alphabétique.

Kritik der reinen Erfahrung, par R. Avenarius, 1er volume, 2e édition, 1 vol. in-8 de xxx-223 pp. Leipzig, Reisland, 1907. — Réédition par Petzoldt de l’œuvre capitale d’Avenarius, complétée d’après les notes personnelles d’Avenarius (dont l’essentiel avait déjà paru dans la Vierteljahrschrift, vol. XX, 1896). L’éditeur constate dans sa préface que le système d’Avenarius n’a pas encore obtenu du public philosophique l’attention auquel il a droit ; il marque fortement le caractère de doctrine biologique générale qui caractérise avant tout l’empire critivisme.

Herders und kants Aesthetik, par Gunther Jacoby, 1 vol. in-8 de 348 p. ; Leipzig, Dürr’sche Buchhandlung, 1907. — Il faut savoir gré à M. Jacoby d’avoir, en ce livre, écrit d’un style alerte, clair, aisé, fait connaître au public une partie de l’œuvre de Herder qui n’est familière qu’aux spécialistes. La Kalligone ne se lit guère ; elle méritait d’être aussi élégamment commentée par un jeune philosophe qui a étudié Herder de près, sinon comme un disciple, du moins avec une grande sympathie, et n’a pas craint d’opposer son esthétique à celle de Kant dans un parallèle qui est tout au détriment de cette dernière. M. Jacoby prend hardiment parti pour Herder, parce qu’il voit dans les thèses de la Kalligone une esthétique objective, fondée sur l’observation psychologique, adaptée à la complexité du réel, tandis que la théorie du beau que nous a laissée Kant ne serait, à tout prendre, avec son formalisme schématique, qu’un fantôme d’esthétique.

Il s’agissait d’abord pour M. Jacoby de défendre l’originalité de son auteur. Le livre s’ouvre par un bon et succinct exposé des principales théories esthétiques qui s’étaient fait jour avant Kant. Outre les pages où l’on prouve, par l’examen des fragments de Kant publiés par Otto Schlapp, que l’esthétique de Herder n’est pas sortie des leçons de Kant, il faut signaler les importants paragraphes consacrés à Baumgarten (p. 43 sq.) et à Mendelssohn (pp. 57-58). De ce long chapitre il ressort, selon M. Jacoby, que Herder fut en esthétique un novateur et que son opposition contre Kant ne fut pas une réaction, un retour vers des modes de pensée antérieurs. On reconnaît pourtant qu’il eut en commun avec Mendelssohn cette idée que le sentiment esthétique est essentiellement une réduction de la multiplicité sensible à une harmonieuse unité. Mais, tandis que pour Mendelssohn cette harmonie est un accord préétabli par le Créateur, que pour Kant c’est une opération logique manifestée par un jugement, ce sera pour Herder une harmonie sen tie