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(p. 63). Toutefois, quelques exemples nous permettent de nous faire une idée du rôle qu’il attribuait à l’expérience. Dans son principe la méthode est toute rationnelle, et l’on voit mal la place que l’expérience y peut prendre. Dans les séries constituées par la déduction cartésienne, l’expérience ne saurait intervenir. Elle fournit seulement les composés, dans lesquels l’analyse devra découvrir et démêler les natures simples (p. 76). Descartes ne dit rien de plus précis dans la partie des Regulæ qui nous est parvenue (p. 77).

La méthode tient étroitement à la métaphysique cartésienne (p. 80). Mais on aurait tort de penser qu’une fois achevée la construction de la métaphysique, il n’y a plus de place pour l’activité vivante de l’esprit (p. 82). La forme même de la Méditation que Descartes a choisie pour exposer sa métaphysique nous atteste l’importance que la méthode, conserve dans le système achevé (p. 83). Les premières causes que Descartes détermine sont à la fois des causes de l’être et des lois de la pensée (p. 85). Il s’agit aussi à la fois de fixer les limites de la connaissance claire et distincte, et de définir la connaissance par les Idées, c’est-à-dire la portée de l’esprit, siège des Idées (p. 87). Au surplus, la première source de toute connaissance est une démarche de l’esprit actif, le Cogito, et la loi qui fixe toute certitude n’est pas autre chose qu’une loi de l’esprit pur (p. 92-93). L’intellect qui découvre le Cogito est le même qui énonce les règles de la Méthode, et le procédé qui nous mène à proclamer la réalité des natures simples est un procédé méthodologique. En définitive le Cogito aboutit à une réflexion sur les principes de la connaissance et à une critique a priori de la connaissance (p. 105). C’est aussi une connaissance de la conscience, de la conscience pure et non de la conscience empirique (p. 107).

M. Heimsoeth examine ensuite les diverses parties de la métaphysique cartésienne et il montre les difficultés que Descartes a rencontrées dans son effort pour appliquer sa méthode.

Ainsi, peu à peu, la méthode est devenue la Scientia universalis (p. 161). Selon M. Heimsoeth, cette science universelle, ce n’est pas tant le système de toutes les sciences que la méthodologie elle-même. Dans sa forme, c’est une mathématique universelle (p. 163), une science des proportions et des rapports en général (p. 169). Ce travail témoigne d’une lecture attentive de Descartes. Il est malheureux que la forme en soit compliquée et obscure et gâtée par une détestable terminologie. Il est regrettable aussi que l’auteur, disciple de Natorp, ne retienne dans Descartes que ce qui peut annoncer Kant. Comme tous les ouvrages de cette série, le livre de M. Heimsoeth se signale par une ignorance systématique de tout ce qui n’a pas été publié par les maîtres de Marbourg.

Logicæ Pars Prima Criticæ. De Conceptu. Scripsit Arpad Borsiczky. Segidini. In ædibus E. Endrenge, 69 p., 1911. — L’objet de cet opuscule est d’abord de situer la logique parmi les disciplines philosophiques pour en délimiter ensuite avec plus de sûreté le domaine. À cet effet, l’auteur établit que des trois disciplines philosophiques connexes : psychologie, logique et métaphysique, aucune ne doit, à proprement parler, être placée à la base des autres. Ensemble, elles forment un tout complexe, dont les parties sont étroitement solidaires : la psychologie traitant de la matière de la connaissance, la logique de la connaissance réglée et réfléchie, la métaphysique de l’existence réelle des choses connues (p. 3, 14, 69). Le tout constitue ce que l’auteur appelle : la philosophie critique, et dispense de toute théorie de la connaissance, qui n’est, à vrai dire, qu’un compromis entre la logique et la métaphysique (p. 5).

Ayant ainsi fixé l’objet de la logique, l’auteur expose la nature de la connaissance logique, fondée sur la conscience de la connaissance individuelle et de ses lois (spontanéité) et sur la relation entre les fonctions de connaissance et leur substratum (évidence). Il énumère ensuite les catégories logiques principales (identité, diversité, limitation, relation) et termine par l’étude classique des rapports du concept avec les catégories du langage, et des rapports des concepts entre eux.

L’auteur a puisé abondamment aux sources de la logique philosophique allemande de ces derniers temps (Wundt, Jérusalem, Ueberweg, Drobish, etc.), et cet excès de compilation nuit d’ailleurs à la netteté de ses conclusions personnelles. Mais surtout, nous croyons que depuis Boole, Schröder, Russell, la logique a pris conscience d’elle-même comme science exacte, positive, indépendante de toute philosophie, et que, de ce moment, a commencé son véritable progrès. La philosophie critique a désormais à tenir compte de ce fait scientifique, elle devrait enfin renoncer à ces vaines tentatives de construire dans le vague des logiques philosophiques.

William James als Religionsphi-