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nous leur attribuer une valeur comme connaissance ? » ; 2° « La physique doit-elle être mécaniste ? », ou « Est-il nécessaire que toutes les hypothèses de la physique se résolvent en propositions relatives aux mouvements de petits corps susceptibles d’être figurés et imaginés ? La physique a-t-elle au contraire le droit de raisonner sur des propriétés capables d’être conçues, mais irréductibles à des mouvements de systèmes qui puissent se dessiner ? » L’expérience ne peut trancher le débat entre la méthode mécaniste et la méthode opposée : car la thèse du mécanisme, — que « les notions de figure et de mouvement correspondent seules à des objets simples et irréductibles ; celles de la seconde catégorie (couleur, chaleur, etc.) correspondent à des réalités complexes qui peuvent et doivent les résoudre en des assemblages de figures et de mouvements », — est évidemment transcendante à l’expérience. Et l’histoire ne prouve nullement que la méthode mécaniste ait été plus féconde que la méthode énergétiste. — Pour la question plus générale, de savoir si la théorie physique est « vraie » ou « commode », M. Duhem tâche de montrer, en se servant de l’ouvrage même de M. Rey, qu’il n’y a pas de vérités en physique autres que les faits d’expérience, et que la théorie physique, même idéale, ne sera jamais qu’une classification de la connaissance empirique. « La critique logique de la méthode employée par la physique et des témoignages des physiciens a donc conduit M. Rey à cette affirmation : La théorie physique n’est qu’un instrument propre à accroître la connaissance empirique ; rien n’est vrai en elle que les résultats de l’expérience. » Et cependant « une intuition instinctive et spontanée le pousse à affirmer qu’il existe une vérité absolue et universelle, partant transcendante à l’expérience ». Le physicien sent que la théorie physique est autre chose qu’un simple ensemble de procédés pratiques ; seulement, et il faut s’en rendre compte mieux que ne l’a fait Rey, « l’étude de la méthode physique est impuissante à révéler au physicien la raison qui le porte à construire la théorie physique ». Nous devinons que l’ordre atteint par la théorie physique tend à être une classification naturelle ; mais ce pressentiment, cette croyance ne peut venir ni de l’expérience, ni des procédés mathématiques employés par la théorie. « Le physicien est forcé de reconnaître qu’il serait déraisonnable de travailler au progrès de la théorie physique, si cette théorie n’était le reflet, de plus en plus net et de plus en plus précis, d’une Métaphysique ; la croyance en un ordre transcendant à la physique est la seule raison d’être de la théorie physique. »

L’Enseignement mathématique. 15 janvier 1908. La préparation des candidats à l’enseignement des sciences mathématiques et naturelles (p. 5-49). — Sous ce titre, L’Enseignement mathématique publie une traduction des « Propositions de la Commission d’enseignement des naturalistes et médecins allemands présentées au Congrès de Dresde » (sept. 1907), par MM. les professeurs A. Gutzmer et F. Klein. En tant que plan d’organisation des études scientifiques, ce rapport présente donc un grand intérêt pédagogique. Mais, de plus, il intéresse plus spécialement les philosophes par sa section IV : « Des études communes en philosophie et pédagogie. Culture générale » (p. 29-30). On peut d’ailleurs regretter la brièveté et la généralité des vues exprimées sur ce point : « Le règlement des examens fait rentrer dans le domaine philosophique, l’histoire de la philosophie, la logique et la psychologie. Nous pensons que ces domaines ne doivent pas être exposés dans les cours d’une façon schématique, mais être au contraire présentés d’une manière intéressante et vivante permettant au candidat d’acquérir une conception claire et juste de l’importance considérable de ces branches dans l’ensemble des résultats généraux du travail scientifique. » Et c’est à peu près tout sur ce sujet. Pour la place de cet enseignement dans le cours des études, voici les indications contenues dans deux schémas, correspondant d’une part aux études mathématiques-physique, d’autre part aux études de chimie-biologie. L’enseignement complet se répartit sur six semestres : au 4e semestre seulement (s. d’hiver), figure « l’histoire de la philosophie et de la pédagogie » ; au 5e, « la Logique » ; au 6e, « la Psychologie ». Ces études en effet paraissent devoir être plus fructueuses, « alors que le candidat dispose, en outre d’un jugement plus mûr, de connaissances scientifiques plus étendues ».

Hibbert Journal (London : Williams and Norgate). Avril 1907-janvier 1908. — L’intérêt, très grand, que présente ce trimestriel réside moins dans la valeur intrinsèque des études qui y sont publiées, que dans leur valeur représentative : elle n’apportent pas grand’chose de neuf pour le savant ni pour le philosophe ; elles sont assez maigres de faits. Mais elles sont riches de sens pour quiconque veut suivre le mouvement des idées religieuses à l’heure présente. Ce mouvement a atteint une grande intensité en Angleterre ; là, comme en France, il se