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église, du couvent, du régiment, à la cité, à la province, à la nation, moins la solidarité est parfaite et frappante. Il y a, en général, plus de logique dans une phrase que dans un discours, dans un discours que dans une suite ou un groupe de discours ; il y en a plus dans un rite spécial que dans tout un credo; dans un article de loi que dans tout un code, dans une théorie scientifique particulière que dans tout un corps de science ; il y en a plus dans chaque travail exécuté par un ouvrier que dans l’ensemble de sa conduite.

Il en est ainsi, remarquons-le, à moins qu’une individualité puissante ne soit intervenue pour réglementer et discipliner les faits d’ensemble. Dans ce cas, — qui, d’ailleurs tend à devenir de plus en plus fréquent, car la civilisation se caractérise par les facilités qu’elle offre à un programme individuel de réorganisation sociale de se réaliser, — dans ce cas, il n’est pas toujours vrai que l’harmonie des agrégats soit en raison inverse de leur masse ; souvent même — et de plus en plus souvent — les plus volumineux peuvent être les plus harmonieux. Par exemple, l’administration française, organisée par le despotique génie de Napoléon, est au moins aussi bien adaptée à son but général que peut l’être le moindre de ses rouages au but particulier de celui-ci ; le réseau du chemin de fer de l’État prussien est aussi bien adapté à sa fin stratégique que peut l’être à ses fins commerciales ou autres chacune de ses gares ; le système de Kant, celui de Hegel, celui de Spencer, sont aussi cohérents dans leur ordonnance générale que le sont quelques-unes des petites théories partielles qui leur ont servi de matériaux. Une législation bien codifiée peut présenter autant d’ordre dans l’arrangement de ses titres et de ses chapitres que chacune des lois partielles qu’elle amalgame en présente dans le lien de ses diverses dispositions ; et, quand une religion a été refondue par une vigoureuse théologie, l’enchaînement de ses dogmes peut être ou paraître plus logique que chacun d’eux pris à part. Mais, comme il est facile de le voir, ces faits, en apparence contraires à ceux que je viens d’énoncer plus haut, concourent en réalité avec ceux-ci à montrer dans le génie individuel la vraie source de toute harmonie sociale. Car ces belles coordinations ont dû être conçues bien avant d’être exécutées ; elles ont commencé par n’exister que sous la forme d’une idée cachée dans quelques cellules cérébrales avant de couvrir un territoire immense.

Dirons-nous maintenant que l’adaptation sociale élémentaire est, au fond, celle