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soit le bassin d’un fleuve. On voit ici une montagne ou une chaîne de collines adaptée a l’écoulement des eaux du fleuve, et les rayons du soleil adaptés au soulèvement des eaux de l’Océan en nuages, puis les vents adaptes au transport de ces nuages vers les cimes des monts, d’où ils retombent en pluies et entretiennent les sources, les ruisseaux, les rivières, affluents du grand cours d’eau. Il y a donc équilibre mobile, circuit d’actions enchaînées et se répétant — se répétant avec variations. — Un être vivant, pourrait-on dire, est un circuit pareil, seulement beaucoup plus complique et où l’adaptation est non pas unilatérale, comme dans l’exemple cite, mais réciproque. L’organe sert à l’accomplissement de la fonction vivante, et réciproquement la fonction vivante sert à l’entretien de l’organe ; mais, dans le régime des eaux de la planète, si la montagne est adaptée à l’écoulement des eaux, l’écoulement des eaux, loin de servir à maintenir la montage, a pour effet de la dénuder et, peu à peu, de la supprimer. C’est aussi sans nulle réciprocité que la chaleur solaire est adaptée à l’irrigation du sol.

C’est toujours, rappelons-le, une harmonie qui se répète. On vient de le voir, montrons-le par d’autres exemples. Chaque planète d’un système solaire, considérée mécaniquement, c’est-à-dire comme un point qui se meut, présente le spectacle d’une harmonie entre son penchant à tomber sur le soleil et sa tendance à s’en écarter tangentiellement : il y aurait opposition si ces deux forces centripètes et centrifuges tendaient a s’exercer sur la même ligne droite, mais, comme elles sont perpendiculaires l’une à l’autre, il y a adaptation. (Opposition et adaptation se transforment ainsi l’une en l’autre dans la nature.) Or la gravitation de la planète est la répétition, la répétition variée, de cette adaptation mécanique. Considérée même géologiquement, au point de sa composition stratigraphique et physico-chimique, une planète est un agencement très harmonieux de strates superposées, et, si l’on en croit sur ce point M. Stanislas Meunier, cet agencement se répéterait dans chaque planète, il se répéterait même dans la constitution générale du système solaire ; car une coupe théorique de la terre donne, du centre à la circonférence, une succession de couches incandescentes, puis solidifiées, puis liquides, puis gazeuses, chacune nécessaire à la suivante, et