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S96 REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE.

dite). Les mots, tels que « plusieurs » et « tout » sont d’an puissant secours pour consolider et résumer les actes antérieurs de la volonté qui ont progressivement opéré cette affirmation de communauté entre les divers objets ; et ici encore il a dû y avoir un synchronisme, réalisé par la volonté, pour que chacun de ces actes particuliers fût possible, c’est-à-dire pour qu’il y eût comparaison et affirmation de ressemblanceentre chaque couple d’objets successivement expérimentés. Le ’percept abstrait (p. ex. verdeur, dureté) n’est autre chose que la qualité ou le percept séparé qui a été affirmé dans la proposition générale, avec ce caractère nouveau que la Volonté subsume et affirme en tant qu’entité cette qualité commune elle vise ainsi à sauver, par le relief affecté (affected emphasis) de l’affirmation, cette connaissance du danger d’être submergée sous la multitude des affirmations d’objets individuels auxquels cette qualité peut être attribuée comme prédicat.

Le concept abstrait (dictum de omni et nullo) doit de même sa naissance à l’activité de la volonté. C’est une unité rationnelle que la volonté a créée en affirmant et réunissant, à son choix, certaines qualités à l’exclusion de certaines autres que les sens avaient pu apporter simultanément. Il ne représente pas une chose il est un ens rationis, un produit artificiel de la pensée pour la formation duquel la volonté a délibérément employé un groupe de percepts en repoussant un autre groupe qui figurait conjointement avec le premier dans le concept sensible de l’objet. Les images particulières et concrètes qui se présentent à l’esprit quand il veut penser un concept abstrait ne se présentent que pour être aussitôt niées par la volonté qui « lutte pour dominer la nature et émerger au-dessus du sensible ». Mais, dans cette lutte, la multiplicité sensible menace à chaque instant d’écraser la volonté en sa recherche de la dissemblance et de la ressemblance, et, quelque grand que soit le pouvoir de la volonté, elle a besoin de l’aide d’un nouvel outil pour soumettre la Nature et le phénoménal, d’un expédient pour simplifier et abréger sa lourde tache. Cet expédient dont elle se servait déjà, mais sans s’en rendre compte, dès son premier pas vers la connaissance, est la Médiation, ou perception de la vérité d’une chose par le moyen de la perception de la vérité d’une autre.

Cette Médiation, en effet, nous l’avons vue à l’œuvre dans la perception où l’intermédiaire nécessaire était la Négation (loi de contradiction). Mais elle intervient dans toutes les opérations de la con-