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G. lechalas. – De Vinfini- mathématique. 488

nous ne songeons nullement à contester la valeur de la généralisar tion géométrique, non plus que le rôle prédominant gue nos per` cepfions jouent .dans notre développement intellectuel. Mais nous ne pouvons nous empêcher de protester contre cette prééminence absolue qu’on prétend accorder aux représentations spatiales’ et même temporelles. Bien qu’anime d’un rationalisme presque intransigeant, M. Couturat accorde tout à la grandeur et même, dirons-nous, spécialement àTétendue, puisque en mainte occasion il doit avoir recours à une grandeur à deux dimensions, et il en fait la condition nécessaire du développement mathématique de l’esprit. Il est vrai qu’il n’attribue aucune part à l’empirisme dans la genèse des représentations spatiales, si bien qu’il en pose l’apriorisme à la façon de Kant et condamne la géométrie générale, qui admet la possibilité d’autres formes spatiales, tout en sauvegardant la part légitime de l’apriorisme. Celui-ci d’ailleurs, quand il s’étend au système particulier de géométrie, perd en réalité tout caractère rationaliste et se réduit à l’affirmation de la nécessité d’une forme particulière de la sensibilité.

Mais laissons cette discussion pour revenir à l’apologie de la généralisation géométrique de l’idée de nombre. Il est incontestable que les grandeurs qui nous apparaissent comme continues suggèrent immédiatement la notion de fraction, et que, d’autre part, une ligne droite se prête on ne peut mieux à la qualification de la mesure. Les nombres imaginaires trouvent dans la géométrie a deux dimensions une interprétation aussi ingénieuse que satisfaisante ; mais ils ne lui doivent pas, historiquement, leur naissance, et même on imagine difficilement que leur notion eût eu cette origine. Quant aux incommensurables, ils exigent une discussion plus approfondie, que nous fournit d’ailleurs M. Couturat « On remarquera sans peine, dit-il, que la définition du point irrationnel est calquée sur la définition du nombre irrationnel. On sera peut-être porté à croire que c’est le nombre irrationnel qui engendre le point irrationnel, et que celui-ci emprunte pour ainsi dire son existence à celui-là. On défrV nit a priori le nombre irrationnel par la seule considération de l’ensemble des nombres rationnels ; puis, quand on passe à l’application des nombres aux grandeurs, xiae fois les nombres rationnels appliqués à la ligne droite, on postule l’existence de points correspondant aux nombres irrationnels. En un mot, on confère d’avance la continuité à l’ensemble des nombres réels, et l’on impose ensuite