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R. EUCKEN. – LA PIIILOSOPIIIE ET LE MOUVEMENT RELIGIEUX. 407 sumer à des tâches problématiques le meilleur de ses forces, celles dont elle aurait le plus impérieusement besoin pour résoudre des problèmes plus essentiels et oplus pressants. Car assurément les rudes combats ne feront jamais défaut à la religion. Son affirmation d’un monde nouveau, d’une réalité surnaturelle, affirmation dont elle ne peut rien abandonner sans abdiquer, la place dans la contradiction la plus pénible avec l’aspect naturel des choses, elle doit opérer un renversement complet de point de vue, il faut qu’elle change l’obscurité et la souffrance du monde en lumière et en joie, qu’elle oppose au doute une certitude, qu’elle ouvre en l’homme une vie nouvelle. Or elle est inévitablement détournée de l’accomplissement de cette tâche fondamentale, elle s’exile du domaine où elle serait vraiment forte si, dans les limites du monde donné, elle ] entre en opposition avec les conceptions de la science et les expé-J riences de l’histoire ; elle agit par là contre son propre intérêt bien entendu et s’expose gratuitement au reproche Urbem proditis dum castella defenditis.

Comment d’ailleurs la religion peut.-elle, par la simple immobilité dans les formes établies, fournir à l’humanité ce que celle-ci réclame d’elle aujourd’hui ? Nous aspirons à un rajeunissement de la vie, à des profondeurs primordiales, à des vérités simples et à des com- ..̃̃ ; mencements purs. Que gagnons-nous en ce sens à reprendre simplement le système des doctrines et des prescriptions traditionnelles ? La religion ne doit-elle pas aussi manifester une puissance de créations nouvelles, ne doit-elle pas s’engager au cœur des problèmes du temps, ne doit-elle pas accaparer ceux, parmi les éléments multiples du mouvement moderne, qui sont favorables à’ son idée maîtresse ? Une religion qui veut véritablement coopérer au progrès de son temps doit guider le mouvement spirituel de l’humanité ; elle ne doit pas se dérober aux problèmes du temps présent, elle, doit les • dépasser. N’est-ce pas manquer de foi à la puissance du divin dans l’histoire, de supposer que les grands mouvements spirituels et les ( graves ébranlements du dernier siècle sont demeurés entièrement | stériles pour l’âme intime de l’homme et pour sa relation au divin ? t Là même ne devrait-il pas se réaliser, par l’oeuvre de l’histoire universelle, un éclaircissement, une spiritualisation, un approfondisse-f| ment ? La philosophie doit tenir délibérément pour la conviction que «  la vérité éternelle n’est pas liée au langage d’une époque déterminée, f – – qulellfi_pgut j.çius parler non seulement à la façon du iv°, ou du xin°,