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110 BEVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE.

ne seront jamais aussi décisifs ; ou bien il n’a aucune valeur, et alors il ne fallait pas en parler, même en passant, et associer cette « contradiction flagrante » ans difficultés d’ordre empirique que rencontre l’hypothèse d’un nombre infini d’atomes. En un mot, si la contradiction invoquée est réelle, c’est une impossibilité absolue qui prévaut infiniment sur toutes les difficultés physiques de l’atomisme ; si, au contraire, comme nous le pensons, elle n’est pas réelle, elle ne constitue même pas la moindre difficulté. A notre avis, on devrait bannir de la Philosophie de la nature tous ces arguments scolastiques, qui ne servent qu’à masquer les difficultés réelles et à dispenser de les étudier. Félicitons du moins M. Hannequin de n’avoir pas cru qu’on peut démontrer mathématiquement l’atomisme par un raisonnement en forme, et de s’être donné la peine de chercher dans l’étude des sciences et des faits des raisons plus profondes et plus délicates, sinon plus probantes.

Il n’en est pas moins vrai que toute sa philosophie des mathématiques est imprégnée de l’esprit du néo-criticisme, et ce vice originel frappe de caducité, dès le principe, toute sa déduction de l’atomisme. Par exemple, l’auteur parle, dans les mêmes termes que M. Renouvier, du « saut mortel du passage à la limite (p. 14) », ce qui prouve qu’il-a épousé l’étrange prévention de l’école à l’égard de la méthode des limites, la seule qui permette, au contraire, de constituer logiquement l’Analyse infinitésimale sur des bases strictement finitistes. Cette influence profonde et tenace s’explique aisément par ce fait que M. Renouvier a été longtemps le seul en France à traiter avec quelque compétence les questions de Logique scientifique et de Philosophie naturelle c’est un mérite et un honneur qu’on ne saurait lui contester, et c’est ce qui justifie l’ascendant et presque, la contrainte qu’il a exercés sur les esprits les plus indépendants. Néanmoins, et tout en lui rendant pleine justice, il est permis de regretter qu’il ait professé et propagé une philosophie mathématique inexacte, qui s’impose avec une telle force, non seulement aux philosophes qui sont obligés de s’en rapporter à. son autorité, mais même à ceux qui ont étudié par eux-mêmes les sciences exactes, seulement sous l’obsession latente, et d’autant plus tyraniiique, des théories d’un maitre impérieux.

En résumé, si l’atomisme n’est pas nécessaire, fi n’est pas non plus contradictoire. 11 ne s’ensuit pas qu’il faille l«î attribuer plus