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E. BATAILLON. lodis PASTEUR. 19

provoquée par un microorganisme. Mais bientôt des expériences contradictoires de Jaillard et Leplat vinrent troubler ce succès, et en 1876, au moment même où le Dr Koch confirmait l’idée de Davaine, Paul Bert, appuyé sur des expériences personnelles, donnait à l’opinion de Jaillard et Leplat le poids de sa grande autorité. Pasteur, aidé de M. Joubert, cultive la bactéridie en milieu artificiel et, contrairement aux affirmations de Jaillard et Leplat, il l’a retrouve constamment et en abondance dans le sang des animaux morts après inoculation. La bactéridie de Davaine et Rayer est donc bien l’agent de la maladie charbonneuse. Mais il fallait se rendre compte des faits contradictoires bien observés par des expérimentateurs habiles. Pasteur pensa que des parasites intestinaux peuvent après la mort envahir rapidement les tissus. S’ils sont anaérobies ils pourront pulluler ; s’ils sont aérobies, comme la bactéridie charbonneuse, ils ne tarderont pas à disparaître. Son attention se porta .spécialement sur un microorganisme dont l’invasion est particulièrement prompte, le vibrionseptique. Ce sont des filaments anaérobies. Entravés dans leur développement, ils donnent des corpuscules germes très résistantsqui attendent des conditions meilleures. Ce vibrion rend parfaitement compte de l’erreur de Jaillard et Leplat. Le sang qu’ils recevaient n’étant pas frais, ils avaient travaillé sur le vibrion septique substitué à la bactéridie charbonneuse ; et ce vibrion septique, qui évolue très vite sur l’organisme, leur mettait sous les yeux une affection exempte de bactéridie. De même Paul Bert, qui croyait détruire la bactéridie par la pression de l’oxygène et obtenir ensuite la mort par un produit qu’il appelait virus, Paul Bert n’avait fait qu’exposer à son atmosphère comprimée les corpuscules germes du bacille septique, qui y résistent parfaitement. Davaine avait donc entrevu la vérité en objectant la possibilité d’une maladie différente, mais cette maladie différente du charbon était maintenant connue c’était la septicémie.

Mais des inoculations charbonneuses pratiquées en grand nombre sur divers animaux se dégageaient certains faits curieux qui méritaient de fixer l’attention. La poule est réfractaire au charbon, et Pasteur se demande à quoi peut être due cette immunité. La température des oiseaux est supérieure à celle des mammifères. Celle de la poule par exemple dépasse celle de l’homme de quatre ou cinq degrés. Si l’on abaisse artificiellement cette température en plongeant les pattes dans l’eau, l’animal prend le charbon et meurt.