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10 REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE.

l’air, en s’emparant de l’oxygène de certaines combinaisons, d’où résulterait pour celles-ci une décomposition lente et progressive. Cette deuxième classe d’êtres organisés serait constituée par les ferments de tout point semblables aux êtres de la première classe, vivant comme eux, assimilant à leur manière le carbone, l’azote et les phosphates, et comme eux ayant besoin d’oxygène, mais différant d’eux en ce qu’ils pourraient, à défaut de gaz oxygène libre, respirer avec du gaz oxygène enlevé à des combinaisons peu stables. Tels sont les faits et la théorie qui paraît en être l’expression naturelle que j’ai l’honneur de soumettre au jugement de l’Académie, avec l’espoir d’y joindre bientôt de nouvelles preuves expérimentales. »

Ces preuves ont été accumulées et, pour se rendre compte de la solidité du terrain sur lequel Pasteur s’était placé, il faut lire les longues discussions qui occupèrent l’Académie des sciences jusque vers 1880 car c’est sous l’aiguillon de la contradiction que la pensée prend sa forme la plus précise.

En 1878, fut publié un écrit posthume de CI. Bernard sur les fermentations. CI. Bernard, par sa conception des phénomènes de la vie, était conduit à une opposition forcée entre les phénomènes de vie ou de synthèse, et les phénomènes de mort ou de destruction, entre la vie proprement dite et les fermentations. Il imagine donc cette hypothèse qu’à mesure que l’organisme ferment Védi fie par nutrition, un ferment soluble, une diastase, prend naissance, et cette substance intermédiaire détermine un phénomène purement chimique. Pasteur reprit les essais de CI. Bernard, et, avec la réserve commandée par les circonstances, établit péremptoirement que la présence de cette diastase n’était démontrée dans aucun cas. Mais bientôt la même thèse reparaissait dans la bouche de M. Berthelot. En présence d’opinions nettement exprimées, Pasteur répondit vigoureusement. « L’organisme tant qu’il vit, tant qu’il n’est pas « transformé en corpuscules germes. tant qu’il y a de la matière fermentescible à décomposer, l’organisme touche incessamment à « celle-ci et lui enlève les éléments carbone et oxygène. Il les réunit « ensuite à sa manière par cette chimie vivante dont le secret nous « échappe, il les réunit avec l’azote, le phosphore, le soufre, le « potassium, etc. J’en conclus, et voici toute mon induction, que « là est le principe de l’action décomposante qu’exerce le ferment