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LA REVUE DE PARIS

eut point de vainqueurs dans cette déplorable bataille ; le gouvernement y perdait la confiance ; le peuple, le respect ; la France, l’espoir. Il n’était pas une de ces balles tirées dans ces trois journées qui n’eût fait une blessure mortelle à la liberté.


La République ne devait jamais se remettre de cette terrible chute. L’Empire était fait. Tous ceux que les débuts glorieux de ce gouvernement du peuple avaient rassurés, désespérèrent. Ceux qui sans cesse s’étaient mis en travers des passions mauvaises et des efforts criminels sentirent leurs forces défaillir et le découragement étreindre leurs cœurs.

Tous ceux qui recherchaient à rejeter la faute des événements sur quelqu’un ou sur quelque chose s’emparèrent avidement de cette occasion de condamner la République. Ce germe de mécontentent ne devait pas tomber dans un sol ingrat.

Le parti napoléonien avait pris une part active à cette criminelle révolte. Sa responsabilité dès ce moment est grande ; le dossier du procès que lui fera l’avenir est déjà presque complet ; les rapports de police le désignent comme travaillant dès ce jour à renverser ce gouvernement que son chef devait trahir. Parmi les noms qui devaient composer le pouvoir nouveau, celui de Louis Napoléon fraternise avec celui de Sobrier sur les listes de proclamation qui furent saisies. La préméditation du 2 Décembre remonte au 23 Juin.

Mais, entre ces deux événements dont l’un fut le résultat de l’autre, il y a cependant une différence profonde : les journées de Juin furent une sédition du peuple, et le 2 Décembre une sédition de soldats : les premières furent une révolte, le second une trahison.


Et maintenant, quand on recherche à qui remonte la responsabilité de ces journées, est-il possible de se méprendre ?

L’avenir plaindra le peuple, il absoudra le gouvernement, il flétrira les ambitieux.

Condamner le peuple serait aussi insensé que de nier ses fautes : il faut surtout admirer ses vertus et déplorer son impuissance. Il avait le droit de demander compte aux gouvernements précédents de leur négligence : personne n’aurait le droit de lui demander compte de ses erreurs.