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LES ROMANS DE LA GRENADE



LE FEU[1]


II

L’EMPIRE DU SILENCE


« Col tempo. » — Dans une salle de l’Académie, la Foscarina s’était arrêtée devant la Vieille de Francesco Torbido, cette femme ridée, édentée, flasque et jaunâtre qui ne peut plus ni sourire ni pleurer, cette espèce de ruine humaine pire que la pourriture, cette espèce de Parque terrestre qui, au lieu de la quenouille ou du fil ou des ciseaux, tient entre ses doigts le cartouche sur lequel est écrite l’admonition.

— Avec le temps ! — redit-elle, quand ils furent à l’air libre, pour interrompre le silence pensif où elle avait senti son cœur s’appesantir peu à peu et couler bas, comme une pierre dans une eau sombre. — Connaissez-vous, Stelio, la maison close de la Calle Gàmbara ?

— Non. Laquelle ?

— La maison de la comtesse de Glanegg.

— Je ne la connais point.

— Vous ignorez l’histoire de la belle Autrichienne ?

— Je l’ignore, Fosca. Racontez.

— Voulez-vous que nous allions jusqu’à la Calle Gàmbara ? C’est tout près.

— Allons.

  1. Voir la Revue des Ier et 15 mai.