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et les diverses organisations politiques, tant musulmanes qu’hindoues, le considérèrent comme un guide et comme un inspirateur. Pendant plus de trois ans, il lui fut permis de tenir, partout dans l’Inde, des meetings qui toujours amenèrent des émeutes, et l’immunité dont il jouit fit qu’on le crut investi d’un pouvoir surnaturel qui vint encore ajouter à son prestige. Il est évident qu’on le croit le vrai maître de l’Inde ; des tentatives furent même faites en différents endroits pour installer une administration Gandhi, d’après l’exemple des républicains d’Irlande. Il n’a jamais expliqué la nature du gouvernement qu’il se propose d’établir, mais apparemment, il vise à l’abolition des innovations occidentales. Comme le montre clairement l’histoire des peuples orientaux, un homme de cette sorte peut devenir extrêmement dangereux ; et les tactiques de non-coopération et de boycottage, dont il sait à l’occasion renouveler les formes, ont amené l’Inde à la désorganisation. La folle carrière du Madhi qui causa au Soudan d’horribles carnages, a de nombreux points de ressemblance avec celle de ce révolutionnaire Hindou qui fut enfin condamné à six ans de prison.

Le soulèvement des Moplahs du Malabar fut le résultat direct de notre politique de « laisser-faire ». Les Moplahs sont des musulmans ignorants et fanatiques qui habitent un pays difficile, et nous avons une ample expérience de leur esprit de révolte. Nos officiers locaux savent que des efforts furent faits, pendant plus d’un an, pour provoquer un soulèvement. Il eût été facile de l’empêcher en prenant à temps d’énergiques mesures ; mais les politiciens intervinrent. L’arrestation et la mise en jugement de quelques agitateurs eût exposé le gouvernement à des attaques semblables à celles qui suivirent la rébellion au Punjab. Le soulèvement Moplah est maintenant entièrement réprimé, mais après la perte d’au moins cinq mille existences, après le meurtre et la torture de nombreux Hindous sans défense, après une œuvre énorme de destruction.

La faiblesse et l’indécision du gouvernement — au cours des cinquante-cinq derniers mois — furent en partie dues au vain espoir que, par des concessions, l’influence pacificatrice du Government of India Act se développerait plus faci-