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blanche qui descend vers la mer, cette romanesque Kasbah, qui, de minute en minute, se précisent et se rapprochent, c’est Tanger. Et bientôt, au milieu d’une foule grouillante où toutes les races se mêlent, assailli par une nuée de gamins loqueteux qui parlent « parisien », l’on débarque sur ce coin de terre chérifienne dont le nom restera l’un des plus captivants et décevants chapitres de l’Histoire diplomatique de l’Europe.

Le nombre et la variété des intérêts qui sont en jeu, le séjour des missions diplomatiques (la France, la Belgique, l’Espagne, les États-Unis, la Grande-Bretagne, l’Italie, les Pays-Bas, le Portugal, la Russie entretiennent des ministres ou des chargé d’affaires) font de Tanger une ville à part, bien plus préoccupée de politique que d’affaires, sorte d’antichambre du Maroc où l’on s’arrête pour causer — et les conversations n’en finissent pas ! — avant de pénétrer par la porte espagnole ou par la porte française dans l’intérieur du Pays. La ville est administrée par une Commission d’hygiène et de voirie. Cette Commission est composée de membres qui sont, soit désignés par le corps diplomatique, soit élus par le Collège international qui assure l’administration municipale de la Ville sous la direction et avec l’assistance des autorités chérifiennes locales. D’importants organismes, comme la Banque d’État du Maroc, la Société de Régie des tabacs, le contrôle de la Dette, ont leur siège social à Tanger, ainsi que les diverses Commissions prévues par l’acte d’Algésiras, comme la Commission d’adjudication des travaux, etc. Un tabor de police français et un tabor de police espagnol assurent la tranquillité de la ville. Depuis dix ans qu’elle attend son statut, Tanger s’est habituée au régime provisoire. C’est qu’en définitive, au-dessus des intérêts européens et des passions que ces intérêts mêmes suscitent, malgré toutes les vicissitudes par lesquelles, depuis si longtemps, Tanger a dû passer, un principe permanent, une puissante autorité morale règnent toujours et règnent seuls : la souveraineté de Sa Majesté le Sultan. Cette souveraineté n’a subi et ne peut subir aucune atteinte, pas plus à Tanger que dans aucune autre partie de l’Empire chérifien. Pour les Musulmans de la zone internationalisée, comme pour ceux