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dans les deux siècles précédants son temps, cinquante années ont été absorbées par des guerres ayant pour origine le sens donné à ce mot.

Un autre économiste, Storch, parlant du système mercantile qui a si longtemps prévalu, déclare : « On peut, sans aucune exagération, dire que peu d’erreurs politiques ont causé plus de mal que le système mercantile… Il a poussé les nations à regarder le bien-être de leurs voisines comme incompatible avec le leur ; de là, leur désir de se nuire l’une à l’autre, de s’appauvrir réciproquement ; de là cet esprit de rivalité commerciale qui a été la cause immédiate ou éloignée de la plupart des guerres modernes. Bref, là où il a été le moins préjudiciable, il a retardé le progrès de la propriété nationale ; partout ailleurs, il a fait couler des flots de sang, dépeuplé et ruiné quelques-uns des pays dont il devait, croyait-on, porter la puissance et l’opulence au plus haut point. »

C’est aussi ce que dit Whately : « Il serait heureux que l’ambiguïté de ce terme n’eût fait qu’embarrasser les philosophes… Elle a fait tout autre chose pendant des siècles, et peut-être pendant de nouveaux siècles fera-t-elle encore plus que toutes autres causes réunies pour entraver les progrès de l’Europe. »

Il est certain, aujourd’hui, que l’interprétation du mot Richesse n’occasionnera plus de guerres dans l’avenir. Mais tout danger a-t-il pour cela disparu ? Loin de là. Nous sommes au contraire menacés d’un péril plus terrible encore. Ce redoutable spectre du socialisme, qui tient la guerre et la révolution suspendues au-dessus de chaque pays du continent et dont l’Angleterre elle-même n’est pas entièrement à l’abri, prend exclusivement son point d’appui, au dire même des socialistes, dans les doctrines émises sur la richesse par Adam Smith et Ricardo.

Ces considérations qui ne sont que l’expression de la stricte vérité, montrent l’importance de la recherche que nous avons à faire. Les observations qui vont suivre suffiront, je l’espère, pour qu’on ne me reproche point de m’attarder à une querelle de mots.

Pour des raisons qui apparaîtront plus loin, il convient de diviser cette étude en deux parties : signification donnée au terme Richesse dans les temps anciens ; signification donnée à ce terme dans les temps modernes.