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REVUE CRITIQUE

D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE


No27
1870
— 2 Juillet —

Sommaire : 112. Sundby, Brunetto Latino. — 113. Hossack, Marie Stuart et ses accusateurs. — 114. Marino, La Baronne de Carini. — 115. Kluge, Histoire de la littérature allemande. — Variétés : Beaumarchais en Allemagne.

112. — Brunetto Latinos Levnet og Skrifter, af Thor Sundby. Kjœbenhavn, Lund, 1869. In-8o, 206-cxliv p.

Nous sommes fort en retard avec cet excellent livre dont la lecture a été pour nous un plaisir mêlé d’une certaine surprise. On ne s’attend guère à voir venir de Copenhague un travail sur Brunetto qui apporte des choses nouvelles ; on croit plutôt avoir affaire à un ouvrage de vulgarisation. Il n’en est rien ; le livre de M. Sundby est une étude de première main, faite toujours sur les sources, qui témoigne chez son auteur d’une instruction aussi étendue, d’un esprit judicieux et d’une méthode vraiment critique ; il fait autant d’honneur au savant danois qu’il en fait peu à ceux de notre pays et spécialement à l’éditeur du Trésor. Faut-il que le texte de cet important monument, accueilli avec raison dans la Collection de nos documents historiques, soit restitué, expliqué et souvent pour la première fois rendu intelligible en Danemark ? Et n’est-il pas attristant, toutes les fois ou peu s’en faut qu’on lit un ouvrage étranger sur un sujet traité en France, de voir qu’il l’a été d’une façon superficielle et insuffisante ? M. Chabaille, l’éditeur du Trésor est mort aujourd’hui, et les critiques de M. Sundby ne pourront plus lui profiter ; mais elles pourront être utiles encore à ceux qui sont chargés de surveiller la publication des Documents inédits et les porter à se faire rendre un compte exact de la méthode suivie par les éditeurs de textes.

Le chapitre I du livre de M. S. est intitulé : la Vie de Brunetto Latino. L’auteur montre d’abord, par des arguments qui me paraissent décisifs, que Latino, et non Latini, est la vraie forme du nom de Brunetto ; il donne ensuite raison à Zannoni et à Fauriel qui placent la naissance de cet écrivain en 1210 environ et non en 12 30, date maintenue par Chabaille sans aucune bonne raison[1]. Il expose avec critique tout ce qu’on sait de la vie de Brunetto, et discute en particulier longuement ce qu’il y a de fondé dans l’accusation célèbre portée par Dante contre lui ; il conclut ainsi (p. 28) : « Si on considère tout ce qui précède, on réfléchira un peu avant d’accepter comme bon et valable le jugement de Dante. Mais si l’on ne doit pas se hâter de jeter à Brunetto la seconde pierre parce que

Dante a jeté la première, il n’est pas non plus nécessaire d’adopter l’opinion

  1. « Cette date de 1230 se lit au bas d’un portrait de Brunetto Latini, gravé d’après le tableau original conservé à la galerie de Florence M. Fauriel fait naître Brunetto dix ou même ouinze ans plus tôt mais nous croyons devoir nous en tenir sur ce point au document d’Oxford (Préf. p. j). » Ce document d’Oxford, c’est cette gravure, laquelle, ainsi que l’inscription, est de 1761.