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château de Wablinga ou Gueibeling, domaine des seigneurs de Souabe. Les Guelfes, défenseurs de la papauté, tirèrent le leur des Welfs, qui possédaient alors le duché de Bavière. Quelles que fussent dès ce moment les querelles que faisait surgir l’ambition ou la vanité des provinces, des cités ou des familles italiennes, elles prenaient l’importance de cette guerre du sacerdoce et de l’empire par l’adoption que faisaient les deux partis de ces dénominations sinistres. L’ardeur du climat, le caractère violent des peuples du Midi donnèrent à ces factions une vigueur nouvelle : les assassinats, les empoisonnements, les massacres, les proscriptions, les incendies, les supplices les plus barbares, les vengeances les plus horribles signalèrent tour à tour la haine des deux partis ; et les auteurs de tant de crimes osaient y joindre encore celui de les couvrir du nom de patriotisme. Ils déchiraient, ils ravageaient, ils ensanglantaient leur patrie, et se vantaient de ne le faire que pour sa gloire. Les Guelfes ne voyaient sa liberté, son indépendance que dans le triomphe d’un souverain qui siégeait sous la tiare dans la vieille capitale des Césars ; les Gibelins repoussaient la domination temporelle d’un pontife, pour reconnaître celle d’un prince qui siégeait en César dans un palais de la Germanie.

C’est par une rivalité de famille que furent introduits à Florence ces noms de fatal augure ; et, comme la République romaine et la guerre de Troie, ce furent les beaux yeux d’une femme qui allumèrent la guerre Florentine. Machiavel nous apprend qu’un chevalier de Buondelmonte, fiancé d’une fille des Amidei, s’étant subitement épris d’une Donati, rompit ses premiers engagemens pour l’épouser. Les Amidei et les Uberti, leurs alliés, lavèrent cette injure dans le sang de l’infidèle ; et les Florentins, partagés en deux factions rivales, luttèrent pendant longtemps de violences et de crimes. Les deux partis se distinguèrent d’abord par les noms de Blancs et de Noirs. Mais les blancs devinrent bientôt des Gibelins, et les noirs se transformèrent en Guelfes. Le père de Pétrarque fut jeté dans ces querelles sanglantes. Notaire à Florence, comme son père et son aïeul Garzo, il n’eut pas comme ce dernier le bonheur d’achever une vie paisible de cent quatre ans dans le même lit où il l’avait commencée. Initié aux affaires publiques, chargé de plusieurs missions importantes, Petracco se trouvait dans un poste honorable, quand surgit cette dispute des noirs et des blancs. La victoire restait aux derniers, quand Charles de Valois, traversant l’Italie pour soutenir la maison d’Anjou en Sicile, fut prié par Boniface VIII de s’arrêter à Florence pour réconcilier les deux partis, ou plutôt pour rétablir la faction des noirs. Appuyés par ses armes, les Guelfes rentrèrent en vainqueurs dans leur patrie ; et le prétendu médiateur devint le complice des vengeances qu’ils exercèrent sur les Gibelins. Le Dante fut un des proscrits de cette réaction sanglante, et se vengea de Charles de Valois par la vigoureuse satire contre la maison de France, qu’il a jetée dans le vingtième chant de son purgatoire. Petracco, condamné comme lui, ne se déroba que par la fuite à la colère des mêmes ennemis. La Ville d’Arezzo devint son refuge. Il y conduisit