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D I A L O G V E.

Charles IX. ſi eſ‍t-il ſi modeſ‍te & bien auisé, que tant s’en faut qu’il ſe ſoit eſ‍ſayé à me diuertir de mon ſainc‍t propos, qu’au contraire touſiours il m’y a aidé & fauoriſé au poſsible : iuſques là, que me voyant partir de France, il s’eſ‍t ioinc‍t à moy, auec ce bon Hiſ‍toriographe : Me priãs tous deux (quoy qu’ils ne cognoiſ‍ſent pour toutes veritez, que celle de l’eſ‍tat) de leur permettre de courre pareille fortune que moy (Ce furent les mots dõt ils m’vſerent à mon depart) quelque choſe qui me deuſt auenir : depuis en çà, nous auons touſiours eſ‍té compagnons de voyage, de table, & de lic‍t, avec toute la meilleure paix & creance que lon ſcauroit deſirer.
Ali. le ſuis bien aiſe d’entendre ce que tu en dis, & de ce que Dieu t’a pourueu en eux d’vne ſi honeſ‍te compagnie, & penſe que ce n’eſ‍t pas ſans myſ‍tere qu’ils ſont venus auec toy. Mais qui t’euſ‍t iamais pensé icy ?
Phi. Mais vous vraiement : il y a bien plus dequoy s’eſmerueiller à vous y voir habiter, & y tenir maiſon (cõme ie m’apperçoy que vous l’y avez dreſſee) qu’il n’y a de m’y voir venir.
Ali. Quant à moy, eſ‍tant pluſ‍toſ‍t Coſmouague qu’arreſ‍tee en certain lieu, ce n’eſ‍t pas de merueilles ſi paſ‍ſant par ce pays, & m’y voyant la bien receue, i’y ay planté mon bourdon & enſeigne, & dreſsé ma famille, tout ainſi cõme ie fay en tout autre lieu où lon me reçoit : Mais toy, duquel la patrie eſ‍t ſi fertile, ſi heureuſe, & plaine d’vn ſi grand nombre de nos amis, ie m’esbahy comme

tu as iamais eu le cœur d’en ſortir, pour venir pe-

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