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LA FILLE DE L’ÎLE ROUGE

— Quelles coutumes observes-tu, Razane ?

— Quelquefois, le dimanche, celles des Anglais.

— Mais les autres jours ?

— Les autres jours, il n’y a pas de religion.

— Qu’est-ce donc que la religion, dis-moi, Zane ?

— C’est la musique et les chants dans le temple le matin, et encore l’après-midi à trois heures, et aussi les discours des Anglais aux cheveux jaunes, quand la musique est finie. Et puis ce sont les histoires contenues dans le petit livre noir qui vous sert de talisman à vous autres.

— Tu n’y crois guère, toi, à toutes ces histoires ?

— Je ne sais pas, dit ingénûment l’Imérinienne.

De fait pouvait-elle savoir ? Des rites enseignés par les Missionnaires, elle ne prenait que la partie extérieure, le culte dans ses manifestations publiques, la musique, les chants et les sermons pompeux. Sa vraie piété allait toute aux coutumes des Ancêtres, aux vieilles croyances léguées par les générations mortes ; celles-là faisaient partie du patrimoine héréditaire, elles ne s’appelaient pas une religion, mais, formes ordinaires de la vie individuelle ou sociale, elles symbolisaient l’âme même de la Race.