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LA FILLE DE L’ÎLE ROUGE

brigandages des Sakalaves, avant que règne la paix française.

Claude se retourna. Par delà des collines basses, une plaine de rizières vertes ou jaunes, divisées en rectangles inégaux par les digues de boue, apparaissait découpée comme un puzzle ; au milieu, l’Ikioupe roulait ses eaux limoneuses et fécondes. L’emplacement avait été bien choisi pour surveiller les cultures nourricières et protéger l’Imérina contre les razzias de pillards venus de l’ouest. Pour gagner la porte, on longea le fossé. Les bords taillés à pic dans la dure latérite, étaient inaccessibles ; à peine çà et là quelques éboulements, dus à l’érosion et jadis facilement réparables, auraient pu donner passage à des hommes agiles. Au fond du fossé, fécondé par les détritus du village, une végétation exubérante : figuiers sauvages au large feuillage sombre, arbustes à grappes de fleurs orangées, tsiafakoumbis hérissés d’épines, quelques caféiers à demi étouffés par les autres plantes, ou des cannes à sucre. Mais la cime des halampounes au tronc droit ou des figuiers vénérables arrondis en dômes, arrivait à peine au ras du sol, et le fossé de défense creusé par les aïeux demeurait toujours infranchissable. Saldagne s’émerveillait : les Malgaches, avec des moyens tout primitifs, de simples bêches longues en forme de spatules, avaient pu exécuter de semblables travaux de protection, aussi efficaces que ceux de nos châteaux du Moyen-Age.

On atteignit l’entrée : le fossé s’interrompait par un mur de terre d’un mètre de large, don-