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LA FILLE DE L’ÎLE ROUGE

l’Inde ou de la Perse, les autres voyants ou criards, d’un effet charmant et puéril dans le triomphe du soleil. Les Bétsimisârak se promenaient par groupes, la plupart en chapeaux extravagants, de grandes pailles du pays, aux bords cabossés, rehaussés de soie rose ou verte, avec de gros nœuds en mousseline ou en pongé ; et sous les larges coiffures, dans les doux visages de bronze doré, des yeux blancs riaient. Les Sainte-Mariennes, au nez busqué comme celui des blanches, grandes et bien faites, étalaient des châles bordés d’arabesques, ou emprisonnaient leurs épaules rondes dans des écharpes de soie d’un bleu pâle, d’un rose tendre, d’un vert presque gris. Et les tirailleurs malgaches, la chéchia posée sur l’oreille, souples dans leur tunique kaki serrée à la taille par la ceinture de laine rouge, suivaient de l’œil ces ramatous aguichantes. Les femmes Sakalaves cachaient sous des voiles rouges ou dorés, pareils à des mantilles, l’édifice compliqué de leurs cheveux massés en trois grosses boules ; elles portaient aux oreilles de multiples anneaux d’argent, dans la narine gauche une rosace d’or, et autour du cou de triples ou quadruples colliers de corail rose.

Claude s’étonnait du chaos des couleurs voyantes et criardes, atténuées et devenues presque harmonieuses à force de lumière ; il admirait l’élégance native de ces filles de la nature, qui jouaient de leurs écharpes aux vives couleurs comme les gitanes des cuevas de Grenade. Il songeait à l’effet qu’auraient produit, sous les