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LA FILLE DE L’ÎLE ROUGE

accolées fût sans habitants. Les bourjanes en occupaient deux d’une façon permanente ; les autres servaient de gîte de passage aux parents ou aux amis.

Saldagne ouvrit la première porte, fermée par un simple nœud en paille de rafla : sur un lit malgache en assez mauvais état, une paillasse de zouzoure portait encore marquée l’empreinte d’un corps, et des vêtements pendus à une cheville de bois attestaient un local habité. La seconde case n’abritait qu’une poule couvant des œufs dans une corbeille. La troisième était pleine de babil et de rires : Claude poussa la porte à demi fermée, vit une bande de gosses en train de jouer ; la plus grande avait bien huit ans, et portait un frère tout jeune à califourchon sur les reins, soutenu par les plis du lamba, à la mode malgache. Tous, à la vue du vazâha, se turent, effrayés. Les plus petits se coulaient vers les coins d’ombre, comme des bêtes surprises ; la fillette à l’enfant glissait des regards timides vers l’Intrus, visiblement anxieuse de savoir s’il allait se fâcher. Claude l’interrogea avec les quelques mots malgaches qu’il savait, mais elle ne comprit pas ou ne voulut pas répondre ; comme il insistait, elle éclata soudain en sanglots. Les pleurs la secouaient toute, et elle serrait convulsivement sur sa poitrine les plis de son lamba, pour empêcher de tomber l’enfantelet, qui, terrorisé, gigotait sur son dos. Les autres, pris de désespoir, se mirent à hurler, et Claude s’en alla vite pour rendre le calme à ce petit monde. Le