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LA FILLE DE L’ÎLE ROUGE

— C’est vrai qu’il y a cinquante ans on était en pleine féodalité japonaise. Les daïmios, avec leurs grands sabres recourbés, aux gardes ciselées par d’admirables artistes, s’ouvraient le ventre par point d’honneur, et les mousmés avaient de l’amour la même idée que nos Imériniennes. Qui eût dit que si vite les usines japonaises concurrenceraient les nôtres et qu’avec des torpilleurs et des cuirassés à tourelles les Nippons anéantiraient une flotte européenne…

— Nous aussi, Saldagne, nous avons, pendant de longs siècles, suivi la coutume des ancêtres. Il nous a suffi d’une génération pour l’oublier. En 1788 nos aïeux traditionnistes menaient une vie peu différente de celle des hommes du XIIIe ou du XIVe siècle. Voyez, depuis cette époque, le chemin parcouru.

— Mais n’oubliez pas que nos ancêtres, comme les modernes Japonais, vivaient sous un climat tempéré et même plutôt rude. À Tananarive, sous les Tropiques, trop douce est la vie, pour qu’il vaille la peine d’y persévérer dans l’effort. Vous aimez trop les Imériniens, Berlier, pour leur souhaiter le bonheur des Japonais.

Durant toute cette période, Tananarive fut en liesse. Les fêtes succédaient aux fêtes. Claude n’allait guère dans le monde, mais ses amis formaient un petit cénacle très gai. Ce fut aussi l’époque la plus heureuse de son union avec