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lui, faisant tourbillonner des feuilles sèches. Il s’arrêta, les jambes coupées, et la sueur d’angoisse coula sur ses membres. Mais les doigts de l’Être ne tordirent point son cou ; il marcha jusqu’à sa maison, vivant toujours.

Quand il fut rentré, une crise de désespoir le prit ; l’idée de Ravô perdue lui redevint insupportable. Il fluctuait d’une de ses religions à l’autre. Sans doute les oudy chrétiens des Monpères étaient plus forts que les fady malgaches ; leur puissance avait annihilé tous ses sacrilèges. Alors il jeta dans l’étable aux cochons le scapulaire attaché autour de son cou depuis vingt ans, et résolut, pour mourir, de profaner les grands fady chrétiens : une nuit, il s’introduisit dans une église, il arracha du mur un crucifix, le piétina, il cracha sur l’autel, il souilla le bénitier, il invoqua contre les dieux des vazaha la Terre sacrée, le Ciel, et tous les Zanahary des Ancêtres, il blasphéma le nom du Christ, et il sortit de l’église, vivant.

Repoussé de la mort par les Êtres invisibles, il en conçut un découragement encore plus profond et une manie singulière de la persécution : Andriamanitra et les Zavatra lui en voulaient, exerçaient sur lui leur méchanceté, en le condamnant à vivre. Il devint tout à fait hypocondriaque, ne sortit plus. Des journées entières, dans la pénombre d’une chambre close, il pleurait sans faire de bruit, comme un