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de peur qu’on lui demandât pourquoi elle s’était tant attardée.

Soudain elle entendit, en haut de l’arbre au pied duquel elle était assise, le chant d’un oiseau inconnu. C’était une plainte triste et mélodieuse, douce comme la voix d’une fille qui dit les mots d’amour, passionnée comme les sons lointains et vibrants d’une valiha. Et ce chant sans paroles,modulé par un gosier d’oiseau, était plus beau que la mélancolique lamentation pour appeler le parent mort, ou que le chant d’Imaintimanga, dont les piroguiers, sur le fleuve Mangourou, égrènent les notes avec les gouttelettes d’eau soulevées par les pagaies. Jamais Iasitera n’avait rien ouï de pareil, elle demeurait extasiée, évitait tout mouvement, de crainte d’effrayer le mystérieux chanteur. La lune s’était levée, inondait maintenant de sa lumière brillante tout le tavy, où luisaient çà et là les énormes feuilles des ravinala, épanouis en éventails, et les gros buissons touffus des palmiers manarana.

Iasitera tout à coup se rappela une histoire que les vieilles, au village, répétaient souvent, le Conte de l’Oiseau-d’Argent-qui-chante-dans-la-forêt. De loin en loin on l’entendait, au temps des ancêtres, et son chant toujours faisait mourir qui l’avait entendu. Si c’était l’Oiseau-d’Argent qui chantait dans l’arbre, au-dessus de sa tête ! La femme-enfant