Page:Renel - La Race inconnue, 1910.djvu/32

Cette page n’a pas encore été corrigée

Voilà pourquoi les gens de Nousivarika ne tuent pas les requins, et pourquoi les requins ne dévorent jamais, à moins qu’ils n’aient violé le fady, les hommes de ma race, à cause de ce qui s’est passé jadis entre le souroukay et mon ancêtre Ratsimanoutou. »

Prosper Lanthelme admira la naïveté des Malgaches, qui osaient, sur la foi de pareilles légendes, affronter les requins. Puis il réfléchit, scientifiquement, aux chances qu’on avait d’être dévoré ; il les jugea si faibles qu’autant valait n’en pas tenir compte. Ainsi la sagesse de ces peuplades primitives se trouvait d’accord avec le calcul des probabilités. De plus les indigènes attribuaient toujours à la violation de quelque fady l’accident qui, de loin en loin, pouvait se produire ; ils conservaient ainsi leur belle tranquillité et leur mépris des dangers de la mer.

L’envie irrésistible de se baigner hantait Lanthelme de plus en plus. En n’entrant dans l’eau qu’à mi-corps, la rencontre d’un requin était presque invraisemblable ; il faudrait un concours de circonstances extraordinaires, qui aurait d’autant moins de chances de se reproduire qu’il avait eu lieu la veille. Mille fois des Betsimisaraka de Nousivarika avaient commis, au même endroit, en face de leur village, la même imprudence que l’Antaimourou, sans que la vague eût apporté de requin. Mille